Le bonheur que tu promets

Une jeune femme offre une boisson chaude à une personne sans-abri.

Un peu de théologie, L’Oasis n°21 : Et après ?

Avec la pandémie, la question de la mort est revenue au centre de nos préoccupations. C’est-à-dire la question de la vie et du sens que nous lui donnons !

« En cette vie où nous espérons le bonheur que tu promets et l’avènement de Jésus Christ notre Sauveur. » Cette formule finale de la prière après le Notre Père nous mène au cœur de l’espérance chrétienne. La traduction à partir de l’original latin en est malheureusement approximative car, en Français, le « et » peut laisser entendre qu’il y a d’une part le bonheur que Dieu promet et, d’autre part, l’avènement de Jésus-Christ Notre Sauveur1. Or la liturgie comme la foi chrétienne ne laissent aucun doute : le bonheur que Dieu promet c’est l’avènement de Jésus Christ notre Sauveur. La plénitude à laquelle nous sommes promis se réalisera par le retour glorieux du Christ : celui qui est venu dans la chair, qui ne cesse de venir notamment dans l’eucharistie, celui-là « reviendra dans la gloire et son règne n’aura pas de fin » proclamons‑nous dans le Credo.

Saint Pierre précise même, en parlant du retour du Christ dans la Gloire, que le Seigneur patiente pour que tous aient le temps de s’y ouvrir par la conversion (2P 3, 9). Dans le même temps, il nous faut marcher vers la sainteté et prier pour « hâter l’avènement du jour de Dieu » (2P 3, 12).

Le jour où nous serons pleinement vivants

La tradition chrétienne c’est que la vie sur la terre est un pèlerinage. Si nous serons tous personnellement confrontés à la mort, et si notre monde n’est pas éternel (les éléments qui permettent la vie, à commencer par le soleil, sont voués à une fin certaine), nous croyons que nous sommes appelés à participer personnellement à la résurrection du Christ (cf. 1Co 15). Mais plus encore, que la Création entière qui « attend avec impatience la révélation des fils de Dieu » sera « libérée de l’esclavage de la dégradation, pour connaître la gloire donnée aux enfants de Dieu » (Rm 8, 19-21). Elle sera « assumée » et récapitulée en Christ. Quand Dieu sera tout en tous (cf. 1Co 15, 28) et que tout sera récapitulé en Christ dans l’amour (cf. Ep 1, 10), nous serons alors pleinement vivants.

Sur ce « Jour », cependant attention, Jésus est très clair :« Vous ne savez ni le jour ni l’heure » (Mt 24, 36). Alors n’essayons pas de percer le mystère du jour et de l’heure. Cela ne nous appartient pas. En revanche, face à la vie qui se présente avec son poids d’angoisses et d’épreuves, nous savons deux choses. D’une part, c’est pour nous aujourd’hui le temps de nous préparer au retour du Christ dans la Gloire, le temps d’apprendre à aimer, le temps d’accueillir l’Amour (1Jn 4, 7) pour en vivre et le reconnaître quand il reviendra tout récapituler en Lui. D’autre part, quelles que soient nos peurs, nous ne craignons rien, tout est dans la main de Dieu : personne n’arrachera ses « brebis » de la main de Jésus ni de la main du Père (Jn 10, 28).

Tout sera ressaisi dans la résurrection du Christ

Croire que Jésus reviendra dans la Gloire, c’est affirmer l’extraordinaire dignité de la personne humaine et de la vie que nous sommes appelés à vivre. Désirer que le jour de Dieu soit hâté, c’est dès aujourd’hui désirer nous disposer à l’Amour et nous engager, par la grâce de l’Esprit Saint, dans la charité envers nos frères et sœurs. Contrairement à ce qu’on pourrait penser, cela ne fait que renforcer l’épaisseur de ce que nous vivons aujourd’hui et donne un souffle extraordinaire à nos existences.

Si je crois que tout ce que je vis sera récapitulé dans l’Amour, si je crois que tout sera ressaisi dans la résurrection du Christ, alors ce que je vis n’en a que plus de dignité.

Tout ce qui fait notre histoire, ce qui fait que nous sommes uniques, ce qui fonde notre identité profonde, tout cela a un poids d’éternité. Cela a tellement de prix aux yeux de Dieu qu’il vient en son Fils l’assumer, le prendre en lui pour le porter dans le cœur du Père (c’est cela aussi que désigne notre foi « à la résurrection de la chair »). Dieu, en Jésus, est venu tout partager de notre vie (cf. Hb 2, 17), pour que nous partagions tout de la sienne.

« Dieu s’est fait homme pour que l’homme soit fait Dieu » disait saint Athanase, avec beaucoup de Pères de l’Église.

L’eucharistie est tout orientée vers cela

À chaque messe, nous sommes déjà faits participants de ce qui se réalisera en plénitude lors du retour glorieux du Fils de Dieu : « Dieu qui nous donne les biens du ciel alors que nous sommes encore sur la terre, mets en nos cœurs un grand désir de vivre avec le Christ en qui notre nature humaine est déjà près de toi ».

Le retour du Christ dans la Gloire n’ouvrira rien d’autre que la plénitude de ce que nous célébrons et annonçons à chaque eucharistie.

Tout ce que nous vivons comme baptisé devrait nous ramener vers ce désir du retour du Christ dans la Gloire. Non pas pour fuir le monde et la vie, mais pour nous y engager à la suite du Christ, dans la grâce de l’Esprit Saint. Cela pour vivre le mieux possible le pèlerinage de notre vie terrestre nous préparant à la plénitude de l’Amour.

Plus nous serons tournés vers le retour du Christ dans la Gloire, plus la charité se déploiera en nous pour nos frères et sœurs aujourd’hui.

Monseigneur Olivier Leborgne, Evêque d’Arras

1. La nouvelle traduction du Missel romain, qui entre en vigueur le 1er dimanche de l’Avent 2021, lève l’ambiguïté : « nous qui attendons que se réalise cette bienheureuse espérance : l’avènement de Jésus Christ, notre Sauveur. »

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