Invictus, de Clint Eastwood : quand Mandela et le rugby fédèrent une nation

Invictus

Le film Invictus de Clint Eastwood, sorti en 2009 après Gran Torino, permet de s’ouvrir à la dimension anthropologique et éthique du cinéma. Deux fiches analytiques du film sont proposées ci-dessous.

Date de sortie : 13 janvier 2010

Durée : 2h12

De Clint Eastwood. Avec Morgan Freeman, Matt Damon, Tony Kgoroge…

Genres : drame, biopic, historique

Nationalité du film : américain

Synopsis et détails :

Le film développe comment le président Mandela s’est servi de la coupe du monde de rugby pour jouer de la symbolique autour du sport et fédérer un pays que tout invite à se taper dessus : c’est une nation qu’il faut rassembler. Le film met en scène l’habileté politique et en même temps une démarche de type symbolique.

Lors de la formation d’octobre 2012 Films et catéchèse, les différentes dimensions de ce film ont été évoquées. Utilisable avec des jeunes, on peut retrouver des supports d’aide pour l’animateur sur la fiche d’analyse des extraits du film.

La bande-annonce du film Invictus

Fiche d’analyse d’extraits du film Invictus

Film de Clint Eastwood de 2009 sorti après Gran Torino. Clint Eastwood est fasciné par les grands héros, grands personnages, fictifs ou réels. Le film Invictus n’est pas une biographie de Mandela.

Le scénario du film développe comment le président Mandela s’est servi de la coupe du monde de rugby pour jouer de la symbolique autour du sport et fédérer un pays que tout invite à se taper dessus.

Dans ce film, c’est une nation qu’il faut rassembler (dans Gran Torino, cela se jouait entre individus).

Le film met en scène l’habileté politique et en même temps une démarche de type symbolique.

1ère séquence : presque au tout début du film de 3’20 à 6’31

Le montage est de type aba’b’ typique des films à suspense. On met en juxtaposition deux univers. La tension va en croissant. A l’issue de cette tension, il apparaît que le président nouvellement élu est perçu comme une menace par tout un ensemble de personnes.

On retrouve le même montage binaire entre ce qui concerne les blancs et les noirs avec à chaque fois un jeu de haine réciproque, la peur chez les blancs et un désir de vengeance chez les noirs. C’est de cette situation qu’hérite le président. Il y a tout ce qu’il faut pour que ça ne marche pas. Le réalisateur joue avec la manière de rendre palpable la tension dans laquelle se trouve le nouveau président.

2ème séquence jusqu’à 11’23 :

Comment est mise en valeur la personne de Mandela ?

C’est un homme solitaire, simple, un grand homme au calme olympien, au-dessus de la peur. Sa hauteur de vue est mise en scène.

Mais il est aussi Madiba qui fait simplement son lit en se levant le matin. Il est très aimable, chaleureux, proche.

Il est donc au-dessus et avec les gens.

Il nomme les choses (il voit les bureaux vides) et il est mis en situation pour camper un personnage de cette stature (intervention des deux flics blancs). Il incarne le discours qu’il tient.

On quitte donc le régime de crainte (rapport de force) du début du film pour passer à un registre différent où l’on quitte la méfiance, la crainte, l’agression réciproque.

La scène se conclue dans un élan lyrique où la nation est comparée à un phare, une lumière. Pour arriver à cet objectif, chacun doit y contribuer.

Il y a une logique politique et de communication pour signifier que les choses ont changé avec le changement de président. Derrière le président, il y a les blancs ET les noirs, il n’est pas le président des noirs. L’écriture filmique soutient les mots. L’ensemble s’articule dans un propos cohérent.

Ensuite est utilisée la dimension symbolique du sport (c’est une équipe de joueurs blancs et un seul noir).

L’intervention de Mandela dans l’assemblée de noirs pose la question de l’intervention politique de
manière plus large.

3ème séquence de 30’19 à 35’03 :

On passe de la connaissance au respect. Mandela expose son calcul politique et aussi humain. Le président rend raison de la cohérence de son attitude.

C’est pour nous une invitation à adhérer à la position claire du réalisateur qui fait un hommage à un grand homme. Sont mis en valeur les gestes forts posés, les obstacles rencontrés et la grandeur d’âme de ce que cela révèle. C’est une mise en gloire de quelque chose porté par cette situation historique (mais ce n’est pas une biographie). Les réactions des différents protagonistes contribuent à cette impression.

Si la finale du rugby est regardée par plus d’un milliard de spectateurs, Mandela, en bon politique, se dit qu’il ne peut pas rater cette occasion de montrer que la situation en Afrique du Sud a changé.

4ème séquence de 43’40 à 49’22 :

Le capitaine de l’équipe de rugby est convoqué à la résidence présidentielle.

C’est toujours un grand homme qui reçoit avec beaucoup de simplicité, qui sert lui-même le thé, qui flatte un peu. Il nous prend à contrepied du type d’entretien que l’on attend. Le spectateur est déplacé. L’échange ne porte pas sur le rugby mais sur le dépassement de soi. (Comment menez-vous votre équipe ? Comment êtes-vous leader de votre groupe ?)

Mandela devient témoin de son propre itinéraire lorsque les conditions lui étaient défavorables. Il a médité en s’appuyant sur un texte qui l’a aidé à tenir debout et cela fait sens. Chacun des deux se raconte. Le chant du capitaine a été un éveilleur. Le réalisateur développe une métaphore du sport et de la vie. Dans le combat du sport se joue métaphoriquement quelque chose du combat de la vie.

Alors comment l’un et l’autre puisent-ils dans leur possibilité de transcender les obstacles ?

Quand il revient à sa voiture vers sa compagne le capitaine François Pinard ne peut pas parler. Le silence est éloquent sur le travail qui se passe en lui. Il finit par dire que Mandela a demandé que l’équipe gagne la coupe du monde ce qui n’a pourtant pas été dit dans l’entretien.

A l’époque où Clint Eastwood a construit son scénario, l’élection d’Obama est au cœur de la situation des Etats-Unis. On entend bien certaines harmoniques avec le film concernant le rapport entre histoire et fiction.

Le film se poursuit avec nombres d’entrainements des joueurs et de matchs en vue de la coupe du monde. Arrive une nouvelle phase de l’entrainement.

5ème séquence de 1h13’21 à 1h17’40 : la démarche initiatique

François a besoin de revivre ce qu’il a entendu, compris. Le capitaine est le seul à s’enfermer dans la cellule de Mandela pendant que les autres poursuivent la visite et qu’il doit assumer son rôle de leader.

A St Bertrand de Comminges à côté de Toulouse, on retrouve la même chose avec le tombeau du saint sous lequel on peut passer une nuit pour être imprégné physiquement des vertus du saint.

François réentend les textes (qu’il a lus entre temps) qui ont maintenus Mandela debout pendant sa captivité.

On pourrait inventorier les valeurs soulignées.

François va pouvoir devenir à son tour témoin de la transformation. Cela nous interpelle comme chrétiens.

Le souffle épique du match de finale contribue au cheminement. Il y a dilatation du temps, le film consacre ½ heure à ce match. C’est à vivre comme une célébration !

Il y a une charge symbolique dans la portée de cet évènement, dans l’émotion. Ce n’est pas l’histoire de l’équipe de rugby mais bien l’histoire d’une nation qui est en marche, en construction.

1h46’44 à 1h54’22 : la victoire

Avec la revue Initiales

Cette seconde proposition permet d’exploiter le film au cours de l’étape 3 de l’itinéraire de la revue Initiales 255, Dieu et la violence de septembre 2019.

Dieu nous invite à transformer la violence qui peut être en nous en exigence d’amour par nos gestes et nos paroles. À partir de questions autour de la violence et du pardon, les jeunes chercheront à comprendre comment la violence est transformée, par qui, malgré quelles difficultés ?

Objectif :

Découvrir à travers des personnes ou des événements que la violence peut être transformée. Expérimenter que chacun de nous peut mettre en pratique des attitudes de non-violence, que l’Esprit Saint peut nous y aider.

Télécharger la fiche du film

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