Catéchèse et handicap : la pédagogie d’Initiation en PCS
La pédagogie d’initiation requiert la liberté des personnes. Mais de quelle liberté s’agit-il ? Sans pour autant laisser croire que la définition de cette « liberté » serait strictement identique selon que l’on soit petit enfant, jeune, adulte, diplômé de Harvard ou apprenti charpentier, l’expérience catéchétique auprès des personnes handicapées peut nous éclairer.
Exercer à la liberté de croire …
Lorsque l’on évoque la liberté des personnes, notamment à propos des personnes handicapées, il ne saurait s’agir de la liberté au sens de l’indépendance et de l’autonomie si fortement valorisées dans notre société. Une autonomie faible et une grande dépendance n’entravent pas pour autant la liberté de croire. La liberté de choix d’une personne lourdement handicapée existe et peut s’exprimer. Comment la respecter sinon en prenant le temps de la rencontre : écouter, regarder, rejoindre la personne dans ses désirs, ses aspirations profondes. Créer un espace de gratuité où l’autre pourra se dire, se révéler. C’est aussi dans cet espace de liberté que sera donnée la possibilité de discerner chez les personnes le Christ déjà présent, agissant, « le désir de Dieu qui a déjà été éveillé en elles par l’Esprit Saint » (TNOC, p 47). Accueillir l’autre avec ses questions, ses demandes, ses découvertes, c’est lui permettre de répondre librement à l’appel de Dieu qui, le premier, s’adresse à lui. Et sur ce registre, ce qui est vrai pour la personne handicapée l’est aussi pour tout un chacun.
« A la triple demande de profession de foi du baptême et de la Vigile pascale, la réponse « je crois » n’a de sens que si elle est éclairée et libre. Cette liberté est une première condition pour mettre en œuvre la pédagogie d’initiation en catéchèse. » TNOC, p.47, 3.1, La pédagogie d’initiation requiert la liberté des personnes.
Une réponse de foi éclairée
Quand le texte national pour l’orientation de la catéchèse en France place dans son premier point d’appui de la pédagogie d’initiation la nécessité de respecter la liberté des personnes, il insiste aussi sur la nécessité d’articuler cette attitude avec une proposition exigeante. Car pour être vraiment libre la réponse de foi doit aussi être éclairée. « Une pédagogie d’initiation passe donc par la médiation des textes bibliques pour faire éprouver la présence fidèle et bienveillante avec laquelle Dieu ne cesse de se manifester aux hommes » (TNOC p 49). La pédagogie d’initiation prend sa source dans les Écritures comme livre d’une Parole vivante d’un Dieu qui veut dialoguer avec les hommes. Le catéchète est au service de cette relation, au service du projet de Dieu pour chaque homme. Il a un rôle de médiateur : permettre à la Parole de Dieu d’entrer en dialogue avec les paroles des hommes.
Un acte de confiance
Il s’agit tout d’abord de rendre possible l’écoute attentive de la Parole de Dieu, qui permettra la rencontre de Quelqu’un. Cette Personne dont d’autres croyants nous ont parlé, et qui a pris chair en Jésus Christ. En laissant la Parole de Dieu faire son œuvre, le catéchète rend possible la réponse à l’appel à suivre le Christ. Un acte de confiance qui peut orienter les choix de toute une vie.
Laisser la Parole de Dieu faire son œuvre, ce n’est pas laisser le catéchisé seul face à une Bible ouverte, mais ce n’est pas non plus prendre la parole à la place du jeune pour lui dire quel « message » il y trouvera pour sa vie.
La Bonne Nouvelle que chacun peut y trouver est le fruit de la rencontre entre deux libertés, celle de Dieu, celle des hommes. « Il ne s’agit pas par exemple d’étudier ou de faire étudier des textes bibliques. L’enjeu sera de réunir les conditions pour que les personnes puissent goûter intérieurement les choses » (L’expérience chrétienne : Dieu entre en conversation avec nous, Les ateliers du CNER n°2). Pour cela, les animateurs gagneront à partager ensemble autour de cette Parole, pour éviter de rester dans une interprétation ou un ressenti trop personnels. Ensuite, avec les jeunes, susciter l’attention, préserver le silence, favoriser l’intériorisation pour que chacun puisse « s’exprimer » dans le groupe.
« L’Église désire avec force faire partager sa foi, permettre à ceux auxquels elle s’adresse de rencontrer le Christ, d’accueillir son Évangile et de vivre de sa vie. C’est pour cela qu’elle vit, qu’elle prie, qu’elle témoigne et qu’elle agit. Mais elle sait bien que l’adhésion à la foi chrétienne dépend de l’action intérieure de l’Esprit et qu’elle n’est vraie que si elle est libre. » Les évêques de France, Catéchisme pour adultes, n° 332.
Catéchètes et catéchisés, disciples du Christ
Catéchètes et catéchisés sont ensemble disciples du Christ, et marchent à sa suite. Sur ce chemin l’un a peut-être pris un peu « d’avance » sur l’autre, et peut introduire, initier, ouvrir aux possibles réponses dans la prière et la célébration, mais aussi dans le concret de la vie quotidienne. « La foi est la réponse à une question qu’un Autre me pose, à la révélation qu’il me fait lui-même, dans une parole, à la fois incarnée et la plus spirituelle qui soit, qui se propose comme une alliance, contre toute aliénation. » (P. François Bousquet, in La Maison Dieu, n° 174, p. 58.) Car l’acte de foi lui-même rend libre, et produit une maturation de cette liberté de croire et de choisir sa vie, la Vie.