Dyspraxie, dyslexie, dysphasie … : le point sur … les « dys »
Enfant paresseux ? Enfant maladroit ? Enfant qui n’écoute rien ? Ou bien enfant « dys » ?
Le diagnostic est parfois difficile à poser et il faut souvent mener un long combat pour que les répercussions du handicap à l’école et dans la vie quotidienne soient reconnues. Les troubles « dys » sont jugés secondaires au regard d’autres problèmes plus graves. Pourtant, ces troubles constituent des freins insoupçonnés non seulement dans la vie quotidienne, mais aussi dans les parcours scolaire, professionnel et social des personnes concernées.
Être « dys », ça veut dire quoi ?
Être « dys » recouvre plusieurs réalités. Si du point de vue clinique, les « dys » désignent un trouble cognitif qui touche le geste (dyspraxie), la mémoire (syndrome mnésique), les fonctions exécutives (syndrome dysexécutif), l’attention (trouble de l’attention / hyperactivité), le développement du langage (dysphasie), les fonctions visuo-spatiales…, le vocable «dys» est aussi utilisé pour désigner les troubles spécifiques des apprentissages dans le domaine scolaire : la dyslexie, la dysgraphie, la dysorthographie, la dyscalculie.
Pourtant, toutes les « dys » ont en commun de concerner un enfant dont l’intelligence générale (la conceptualisation, la logique, le raisonnement) est préservée. Par ailleurs les enfants sont issus de tous les milieux, en ce sens que leur environnement social, familial et culturel n’est pas responsable de leurs difficultés.
Faisons le tour des troubles « dys » :
- la dyspraxie
- la dysphasie
- le syndrome mnésique
- le syndrome dyséxécutif
- la dyslexie et la dysorthographie
- la dysgraphie et la dyscalculie
- Pour aller plus loin : quelle attitude avec les personnes dyspraxiques ?
- A retrouver aussi ce témoignage : Foucauld, un cérémoniaire peu ordinaire !
La dyspraxie
C’est un dysfonctionnement des praxies (gestes) qui se traduit par un trouble de la coordination, de la planification et de la reproduction du geste volontaire.
Il y a différentes formes de dyspraxie et, selon les cas, elles portent sur le développement moteur, sensori-moteur ou idéo-moteur (gestes symboliques, mimes en l’absence d’objet…). L’enfant dyspraxique a du mal à automatiser des gestes appris. Résultat, il est lent, extrêmement fatigable, maladroit et brouillon. Par ailleurs, les résultats sont fluctuants : il peut réussir un geste un jour, et le rater le lendemain.
Ces troubles apparaissent dès les premiers stades du développement et se manifestent par des difficultés à adapter son geste à un objectif, à réaliser un geste ou à le reproduire, ce qui entraîne une maladresse importante qui peut être à l’origine d’une dysgraphie.
Les symptômes (manifestations) :
- Difficultés à s’habiller, à se moucher …
- Difficultés à assembler différents éléments d’un puzzle, à faire son cartable …
- Difficultés d’utilisation et de manipulation d’objets et d’outils : mettre la table, se servir à boire, se coiffer, lacer ses chaussures, utiliser une clé, écrire lisiblement et/ou rapidement, tracer des traits, jouer un instrument de musique, jouer aux billes …
- Difficultés à réaliser des gestes symboliques comme faire signe de se taire …
- Difficultés visuo-spatiales ne permettant pas un bon repérage dans l’espace, en particulier pour se déplacer dans des lieux peu familiers, pour se repérer sur un plan, ou dans l’espace de la feuille du cahier, dans les pages d’un livre ou d’un dictionnaire, pour lire un graphique, des tableaux…
- Difficulté spatio-temporelle, ne permettant pas de se repérer dans le temps (hier, aujourd’hui, demain, passé ,présent, futur) et/ou dans l’espace.
Les répercussions :
- Manque d’autonomie dans la vie quotidienne.
- Scolarité très difficile particulièrement dans un certain nombre de matières enseignées comme :
- la géométrie du fait d’une manipulation inadaptée des instruments comme le compas, l’équerre …
- les matières scientifiques, technologiques, sportives et artistiques.
- Participation limitée aux activités ludiques.
- Mauvaise organisation au quotidien :
- difficultés dans l’utilisation des manuels scolaires ;
- difficultés pour organiser les allers et retours de la feuille au tableau, notamment au CP.
- Lenteur.
- Grande fatigabilité.
- Mauvaise estime de soi souvent renforcée par une incompréhension des adultes.
- Isolement social.
- Risque de dépression grave ou de repli sur soi qui peuvent être confondus avec des troubles du comportement.
- Dysgraphie qui peut être persistante à l’âge adulte ce qui génère une vraie gêne.
- Difficultés d’apprentissage des savoir-faire professionnels d’autant plus sévères que l’échec scolaire ne leur laisse souvent ouvertes que des professions dites manuelles ou pratiques pour lesquels ils sont particulièrement incompétents.
- Difficultés à se déplacer dans le cadre du travail et des loisirs du fait des difficultés d’organisation spatiale.
La dysphasie
Les troubles spécifiques du développement du langage oral sont communément appelés “dysphasie”. Ces troubles peuvent toucher les aspects réceptifs (décoder le langage reçu) et/ou expressifs (phonologiques, lexicaux syntaxiques …). Ils s’accompagnent souvent de difficultés d’apprentissage du langage écrit.
Les symptômes (manifestations) :
- Paroles indistinctes, problèmes de syntaxe, expression par mots isolés, discours plus ou moins construit, manque de mots…
- Les personnes atteintes par ces troubles ont du mal à transmettre aisément des informations, des sentiments, à réciter des leçons, à raconter des histoires, à dialoguer, et ont des difficultés dans toutes les restitutions orales.
- Difficulté de compréhension de ce qui est transmis oralement, et donc inadaptation des comportements.
- Difficultés dans la communication malgré une bonne appétence pour celle-ci.
- Difficultés d’apprentissage scolaire.
- Difficultés d’intégration scolaire et sociale.
- Risque d’isolement.
- Mauvaise estime de soi.
- Voire, développement de troubles du comportement.
Le syndrome mnésique
Ces troubles du développement des processus mnésiques peuvent porter sur la mémoire de travail et/ou la mémoire à court terme et/ou la mémoire immédiate et/ou sur la mémoire à long terme. Ils apparaissent au cours du développement de l’enfant vers 5-6 ans et sont permanents.
Ils ont des répercussions significatives sur les différents types d’apprentissage.
Les symptômes (manifestations) :
- Oubli d’une leçon bien apprise la veille.
- Oubli des consignes données (l’enfant ou l’adulte doit relire plusieurs fois).
- Égarement et perte d’objets personnels fréquents.
- Difficulté à donner du sens aux textes longs par oubli du contenu des premières phrases alors que la lecture est courante.
- Difficultés d’apprentissage scolaire. Le pronostic scolaire est remis en cause. Les jeunes atteints par ces troubles seront souvent orientés vers des apprentissages de “savoir-faire” : métiers manuels ou pratiques.
- Difficulté dans les relations avec la famille, les amis, les collègues de travail… s’ils n’acceptent pas le côté “tête en l’air qui oublie ce qu’on lui a demandé” .
- Difficulté relationnelle avec les enseignants qui pensent que l’enfant n’a pas appris sa leçon ou avec les employeurs qui interprètent cela comme de la négligence professionnelle.
- Difficulté à suivre un cours, un exposé, un briefing, une conversation …
- Difficulté à participer à un travail en équipe.
- Difficulté à gérer leur vie économique, familiale et sociale pour les adultes.
Le syndrome dysexécutif
Ce trouble perturbe les fonctions exécutives (linguistiques, mnésiques, praxiques, visuo-spatiales, et raisonnementales) qui contrôlent et régulent les tâches complexes. Les gestes ne parviennent pas à s’ajuster à l’action en cours.
La dyslexie et la dysorthographie
Il s’agit d’une altération spécifique et significative de la lecture (dyslexie) et/ou de la production d’écrit et de l’orthographe (dysorthographie).
Ces troubles apparaissent dès les premiers moments de l’apprentissage sous la forme d’une difficulté à maîtriser le stade dit alphabétique de l’apprentissage de la lecture.
Au stade suivant, le trouble se manifeste par une incapacité à mémoriser la forme visuelle des mots et à les reconnaître globalement (stade orthographique). Ceci entraîne une lecture généralement hésitante, ralentie, émaillée d’erreurs qui a pourtant exigé beaucoup d’efforts. L’orthographe, qui normalement se développe au fur et à mesure que s’automatise la reconnaissance globale des mots, est touchée.
La déficience liée à la dyslexie est d’intensité variable selon les individus. Elle peut être accompagnée de troubles du calcul, de la coordination motrice (et en particulier du graphisme) ou de troubles d’attention, avec ou sans hyperactivité.
Les symptômes (manifestations) :
- Difficulté à identifier les mots.
- Difficulté à lire sans erreur et de manière fluide.
- Difficulté à découper les mots dans une phrase.
- Lenteur exagérée de la lecture.
- Difficulté de compréhension des textes.
- Écriture lente et difficile, parfois illisible (dysgraphie).
- Nombreuses fautes d’orthographe, certaines phonétiquement plausibles, certaines aberrantes.
- Fatigabilité importante liée à l’activité de lecture et d’écriture.
- Mauvaise tenue des cahiers scolaires. Sont souvent incomplets, illisibles et incompréhensibles, ce qui entraîne des difficultés à étudier les leçons et faire les devoirs.
- Difficultés de lecture et d’écriture ne permettant pas d’accéder naturellement à l’information.
- Absence de goût pour lire et écrire.
- Difficultés d’apprentissage dans de nombreuses matières : les matières littéraires sont les plus affectées, les matières scientifiques aussi peuvent l’être de par les difficultés de compréhension des énoncés.
- Problèmes de compréhension des sujets écrits aux examens, de la production d’une copie lisible et correctement orthographiée, et du temps mis pour l’écrire.
- Résultats scolaires pas à la hauteur des efforts fournis.
- Scolarité plus difficile avec risque de redoublement, interruption de la scolarité ou orientation vers une formation moins ambitieuse que ses capacités intellectuelles seraient en droit de lui autoriser.
- Difficulté à gérer des situations où il est nécessaire de lire ou d’écrire (CV, petites annonces, tests d’embauche …)
- Fragilisation psychologique.
- Estime de soi diminuée.
La dysgraphie et la dyscalculie
Elle se définit par une anomalie du mouvement cursif et se traduit par une mauvaise qualité du trait, des espacements irréguliers entre les lettres et les mots, une écriture exagérément grande ou petite, réalisée de manière lente, illisible ou douloureuse.
La dyscalculie :
Elle est une altération de la capacité à comprendre et à utiliser les nombres, les opérations. Ils peuvent également générer des difficultés d’apprentissage dans le raisonnement logico-mathématique. Ils s’associent souvent à d’autres troubles spécifiques. Ils en sont également souvent une des conséquences (troubles de l’attention et exécutifs, troubles du langage, troubles visuo-spatiaux, difficultés mnésiques).
Les symptômes (manifestations) :
- Difficulté à compter.
- Difficulté à dénombrer.
- Difficulté à reconnaître immédiatement les petites quantités.
- Difficulté à connaître les systèmes numériques oraux et/ou arabe.
- Difficulté à passer d’un code numérique à un autre.
- Difficulté à manier la numération en base 10.
- Difficulté à se représenter en analogique une quantité.
- Difficulté à effectuer un calcul mental.
- Difficulté à poser un calcul par écrit.
- Difficulté à résoudre des problèmes.
- Difficulté à apprendre des faits numériques comme une table de multiplication.
- Difficulté à poser une opération.
Les répercussions :
- Difficulté dans le quotidien liées à manipuler des sommes d’argent (pour faire les courses par exemple).
- Difficulté à manier les nombres et les chiffres : durée, distance, quantité …
- Difficulté en mathématiques et dans les matières nécessitant l’utilisation de données numériques (gestion du temps).
L’évolution :
Beaucoup de progrès sont visibles, à force d’entraînement. Ergothérapeutes, psychomotriciens et orthophonistes permettent de surmonter un certain nombre de difficultés. Pour autant, l’enfant ne doit pas être sollicité en permanence pour faire ce qui lui est difficile, se sentir sans relâche en « rééducation ». Il doit pouvoir faire des choses «sans y penser» pour le plaisir, et avec efficacité et facilité. D’autant que ces jeunes ont beaucoup d’atouts et de talents dans d’autres domaines : langage, raisonnement, mémoire, qu’il faut développer.
Les chiffres varient normalement selon les études, selon les pays et selon les époques. Selon la nature des troubles que l’on inclut dans l’étude, selon le degré de sévérité pris en compte, les chiffres varient de 1 à 10%.
En France on parle de 6 à 8% de troubles « dys ». On peut dire que 4 à 5 % des élèves d’une classe d’âge sont dyslexiques, 3% sont dyspraxiques, et 2% sont dysphasiques.
Aucune étude fiable n’a donné un chiffre des troubles DYS en France.
Quelle attitude avec les personnes dyspraxiques ?
Si l’on se focalise plus facilement sur les difficultés techniques de l’enfant car on pense pouvoir apporter des solutions pratiques c’est bien sur les conséquences qu’il faut en fait être le plus attentif. La mauvaise estime de soi de l’enfant et le repli sur lui-même qui en découle est une vraie souffrance contre laquelle il est possible d’agir. Sur ce point, l’entourage du Dys peut accompagner l’enfant en le valorisant, en l’accueillant et en l’ouvrant aux autres. Le Dys trouvera les techniques qui lui permettront de contourner ses difficultés matérielles mais c’est à son entourage de l’aider à changer le regard qu’il a sur lui-même (comme le fait le Christ quand il nous regarde de manière bienveillante malgré nos handicaps).
- Dire, plutôt que montrer. Ce n’est pas en montrant à l’enfant la façon de faire telle chose qu’on va l’aider. Mieux vaut lui donner des instructions verbales plutôt que de lui dire « regarde comment je fais » car, en général, il n’apprend pas en imitant. Détaillez verbalement les étapes. N’oubliez pas qu’il lui est difficile de faire plusieurs choses à la fois et qu’il aura peut-être besoin de votre aide dans certains domaines.
- Créer des repères. L’enfant a généralement du mal à se repérer dans le temps et l’espace. Dans ce cas on peut l’aider à gérer son temps en lui allouant un délai pour réaliser chaque tâche. Ensuite, on arrête même si la tâche n’est pas finie, sinon il se fatiguera. Le fait de voir une limite concrète à l’effort peut lui apporter un regain d’énergie.
- Favoriser l’expression corporelle, par le mime par exemple, qui peut lui permettre de maîtriser et exprimer ses émotions. L’expression par des saynètes, sketchs petites mises en scène etc.. favorise l’appropriation de situations et d’événements en en verbalisant les étapes : proposer de se glisser dans la peau du réalisateur de cinéma qui doit concevoir le script en détaillant à l’oral les gestes à effectuer, la position spatiale des objets utilisés…
- Aidez-le sans l’assister. Simplifiez les actions et décomposez-les par étapes. Un carnet permettra à l’enfant de consigner ses « check-listes », suite d’étapes pour obtenir le résultat escompté. Si l’enfant est difficilement compréhensible, essayez de comprendre ce qu’il dit en reformulant sa phrase mais sans lui demander de la répéter. Il faut aussi avoir le courage de lui dire : « excuse-moi, je n’ai pas compris », plutôt que passer à autre chose.
- Pour ceux qui ne parviennent pas, ou pas encore, à un langage articulé complet, le geste, le mime et les expressions corporelles peuvent renforcer le langage parlé. Objets, photos dessins, outils complétés par le geste en LSF (langue des signes française) peuvent aider à acquérir la conceptualisation nécessaire au langage oral.
- Des méthodes qui peuvent aider : La méthode Borel-Maisonny associe à chaque son un geste. La dynamique naturelle de la parole (DNP)symbolise le son par une trace de peinture.
A lire aussi : Mon enfant est DYS, Guides Déclic, Collection mon enfant, https://hizy.org/fr/boutique
Des sites : Fédération Française des Dys : http://www.ffdys.com
Témoignage : « Foucauld, un cérémoniaire peu ordinaire ! »
Le témoignage des parents de Foucauld. Servant de messe depuis l’âge de sa première communion, Foucauld a évolué dans cette responsabilité. Parce qu’il est dyspraxique, Il n’a jamais pu être thuriféraire (celui qui est en charge de l’encensoir) mais ce la ne l’empêche pas, lui qui a maintenant 16 ans, d’être un cérémoniaire très apprécié de sa paroisse !