« Approfondir la réflexion sur le mystère de la famille »
Cet article revient sur l’intervention donnée par Mgr Pierre-Yves Michel au terme de la session du SNCC « Rejoindre les familles ».
Mgr Michel remercie, au nom des évêques, l’équipe d’organisation et les participants dont il souligne les efforts d’imagination, la créativité et l’élan missionnaire. Il y voit l’œuvre de l’Esprit Saint. Evoquant la vie de Mgr Billé dont l’amphithéâtre porte le nom, il invite à être attentif à cette expérience profondément humaine d’être né dans une famille.
Il a vécu cette session comme une invitation à la conversion personnelle mais aussi à la conversion pastorale et missionnaire des manières de travailler dans nos Eglises diocésaines.
Amoris Laetitia doit être reçu comme un appel dans un moment favorable, de même qu’en 1981, Familiaris Consortio a aussi été reçu comme un appel. L’Esprit suscite avec le Pape François quelque chose de nouveau et d’original mais dans la continuité de notre histoire ecclésiale. Il faut savoir le recevoir. Ce qui fait l’originalité de ce texte et facilite sa réception, c’est qu’il est narratif. La narrativité permet beaucoup de chose et rejoint nos récits à nous et ceux des hommes et des femmes que nous rencontrons.
Il est bon d’approfondir la réflexion sur le mystère de la famille, de voir clairement ce qui s’y joue. En 2015, la session annuelle de formation doctrinale des évêques a travaillé sur la famille. Mgr Michel en retient la réflexion du Père Frédéric Louzeau à partir de l’œuvre du philosophe Gaston Fessard. Il y a deux dialectiques qui forment l’architecture des relations entre les humains : la relation maitre/esclave et la relation homme/femme. Or, dans la famille, il va y avoir une interférence entre ces deux dialectiques qui va leur permettre de se corriger. Avec la paternité, la maternité et la fraternité, les relations deviennent beaucoup plus riches et cela corrige ce qu’il peut y avoir de rivalité ou d’idéalisation dans les relations humaines. La famille est un « laboratoire », un lieu où se vit une humanisation et c’est pour cette raison que c’est aussi un lieu essentiel pour la transmission de la foi.
Mgr Michel fait référence aussi à une conférence de Mgr Barbarin sur l’Evangile de la famille. La famille en elle-même nous situe au cœur de la révélation chrétienne. La famille n’est pas seulement à utiliser pour transmettre la foi mais, dans ce qu’elle vit, elle expérimente et met en lumière le mystère trinitaire, le mystère pascal … C’est pourquoi, être à l’écoute des familles, c’est aussi l’occasion de grandir dans la foi. Il y a trois principes simples à retenir dans les débats actuels : pas de famille sans enfant ni d’enfant sans famille ; pas d’enfant sans parents ; pas de parents sans alliance. Or le plus fragile, c’est l’alliance et cela doit nous encourager à être des serviteurs de cette alliance. Il faut aimer le monde sans toutefois entrer dans sa logique et résister, de manière évangélique, en nous appuyant sur la révélation chrétienne mais aussi au nom de la raison humaine.
Dans la Bible, tout est nuptial ; Amoris Laetitia concerne aussi les religieux. L’alliance est permanente. Cela incite aussi à faire une catéchèse sur le mariage qu’on ne fait peut-être pas assez. On pourrait, par exemple, fêter les anniversaires de mariage au cœur de la communauté chrétienne.
Le temps de partage des initiatives a été très stimulant. Dans son diocèse, Mgr Michel propose aux familles dans lesquelles il est invité de commencer par prier ensemble les vêpres, en prenant le temps d’expliquer le sens de la démarche. Cela change quelque chose dans la relation. On peut aussi aider les parents à partager la Parole de Dieu en famille, à exercer le service de « rompre le pain de la Parole pour leurs enfants » (expérience d’une famille du néo catéchuménat à Strasbourg). Dans le partage de la Parole de Dieu en famille, on pourrait aussi s’inspirer du judaïsme qui a une longue tradition de transmission dans la famille. Dans le diocèse de Valence, les services diocésains ont été décloisonnés ; les services de la catéchèse, du catéchuménat, de la liturgie et des pèlerinages, tout ce qui est croissance de la vie et de la foi, ont été regroupés sous la rubrique « familles/jeunes ». Cela a fait bouger beaucoup de choses. Il y a aussi des innovations à imaginer dans le rapport avec l’enseignement catholique. Enfin, la question des vocations (qui va être abordée au prochain synode avec les jeunes) et la question des migrants peuvent se connecter aussi.
Mgr Michel propose de terminer par le texte de la Samaritaine, qui revient à plusieurs reprises dans Amoris Laetitia. Le texte nous invite à regarder Jésus pour pouvoir regarder comme Lui. Jésus croit en la vie, il croit en l’amour et il ouvre des chemins de vérité. Il se met en posture d’accueil pour cette femme en demandant à boire et, en même temps, il se proclame source de vie éternelle. Il envoie cette femme au plus profond de son cœur pour faire la vérité dans sa relation avec Dieu ; il ne gomme pas son histoire mais il l’invite à de nouvelles relations fraternelles. Elle va témoigner de ce que Jésus a ouvert dans sa vie comme guérison et comme vie nouvelle.
Nous pouvons vraiment compter sur la fidélité de Dieu qui nous donne de « libérer les énergies de l’espérance » (AL 57).