A l’image de son corps glorieux
Que dit la Bible ? L’Oasis n°7 : La résurrection de la chair.
Contrairement à une opinion répandue, il n’y pas, dans la Bible, d’opposition entre le corps mortel et l’âme immortelle.
Le corps : âme, chair, esprit
Le corps, dans la Bible est à la fois âme (en hébreu nephesh), chair (basar) et esprit (rouah). Notre corps est fait pour bouger, travailler, communiquer, aimer, donner la vie. Le mot « âme » insiste sur le désir de vivre. Le mot « chair » souligne plutôt la réalité fragile de notre être physique. Le mot « esprit », enfin, désigne le souffle de vie.
Remarquons une chose : les poètes bibliques disent que Dieu a un Esprit (saint), une âme, un cœur, mais ils ne disent jamais qu’il a une chair. Aussi la foi chrétienne surprend-elle quand elle affirme que le « Verbe [de Dieu] », la Parole créatrice, « s’est fait chair » (Jean 1,14) en Jésus Christ. Il y a là quelque chose de très particulier qui dit le prix accordé par Dieu à notre humanité charnelle.
Jésus, le premier ressuscité
Lorsque Jésus meurt sur la croix, c’est donc tout son être qui meurt.
Lorsqu’il ressuscite, c’est tout son être qui ressuscite. Quand Paul, le premier théologien chrétien, réfléchit sur la résurrection de Jésus, il s’appuie sur la foi juive en la résurrection des corps. Dans le livre de Daniel, par exemple, on a des traces de la foi en un « jugement dernier » où « beaucoup de gens qui dormaient dans la poussière de la terre s’éveilleront, les uns pour la vie éternelle, les autres pour la honte et la déchéance éternelles » (Daniel 12,2).
Il est un fait, raconté plusieurs fois dans les Évangiles, qui étonne toujours. Lorsque Jésus ressuscité apparaît à ses disciples, il est à la fois le même et autre. Il est autre car on ne le reconnaît pas – l’épisode des marcheurs d’Emmaüs est célèbre (Luc 24). Son corps échappe donc aux limites qui sont les nôtres. Mais, en même temps, son corps ressuscité reste un corps physique car Jésus marche, parle, prie, demande qu’on le touche, mange (voir Luc 24,37-43 ou bien Jean 20,27 et 21,12-13). Lors de « l’Ascension », Jésus est élevé au ciel avec son corps. Désormais « assis à la droite de Dieu », il en partage la vie, la force, la gloire. Il est séparé physiquement de ses disciples mais il reste historiquement présent à eux grâce à l’Esprit Saint. La foi chrétienne dit que le corps de Jésus Christ est désormais « glorieux ».
Un corps transformé
Au premier siècle de notre ère, on attendait la résurrection des justes – âme, chair et esprit – pour la fin des temps. Il se trouve que Jésus, le premier des justes, est ressuscité. Notre histoire se déroule désormais dans la lumière de Pâques, dans l’attente du retour du Christ à la fin des temps. Ce jour-là, les vivants comme les morts vont participer en plénitude à la vie divine : « La trompette retentira et les morts ressusciteront, impérissables, et nous, nous serons transformés » (1 Corinthiens 15,52) dit saint Paul. Ailleurs, il précise : « nous attendons comme sauveur le Seigneur Jésus Christ, lui qui transformera nos pauvres corps à l’image de son corps glorieux » (Philippiens 3,20-21).
Être vivant dès cette vie
Saint Paul ose crier haut et fort :
Si l’on proclame que Christ est ressuscité des morts, comment certains d’entre vous disent-ils qu’il n’y a pas de résurrection des morts ? S’il n’y a pas de résurrection des morts, Christ non plus n’est pas ressuscité, et si Christ n’est pas ressuscité, notre prédication est vide, et vide aussi votre foi. (1 Corinthiens 15,12-14).
Cependant, Paul sait que tout cadavre se décompose. Alors, il reprend et développe la distinction entre le corps « soumis à la corruption » et le « corps incorruptible » : « Ce qui est semé périssable ressuscite impérissable ; ce qui est semé sans honneur ressuscite dans la gloire ; ce qui est semé faible ressuscite dans la puissance ; ce qui est semé corps physique ressuscite corps spirituel » ( 1 Corinthiens 15,42-44). Pour Paul, « physique » vise le corps habituel (âme, chair et esprit) alors que le mot spirituel vise le même corps mais animé par l’Esprit de Dieu, l’Esprit Saint donné dans la résurrection de Jésus Christ.
L’Esprit Saint agit pour que nous soyons des vivants dès cette vie pas uniquement après notre trépas. Nos corps, à nous, sont renouvelés par le baptême. Dans la lettre aux Romains, Paul relie fermement le don de l’Esprit Saint à la Pâque du Christ :
L’espérance ne déçoit pas, puisque que l’amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par l’Esprit Saint qui nous a été donné. Alors que nous n ’étions encore capables de rien, le Christ, au temps fixé par Dieu, est mort pour les impies que nous étions. […] Si nous avons été réconciliés avec Dieu par la mort de son Fils alors que nous étions ses ennemis, à plus forte raison, maintenant que nous sommes réconciliés, serons-nous sauvés en ayant part à sa vie. (Romains 5,5-6.10).
En proclamant la résurrection de la chair, la foi chrétienne montre la valeur qu’elle attribue à notre humanité, à nos corps de chair. « Nous ne sommes pas des anges, nous avons un corps » disait sainte Thérèse d’Avila.
P. Gérard Billon, bibliste à l’Institut catholique de Paris
L’âme est spécifique à un corps. Lorsque le Christ vient pour sauver l’humanité, il ne peut sauver que tout l’homme, « corps et âme ».
– Mgr Michel Aupetit, archevêque de Paris