Oser la rencontre et le dialogue
Que dit la Bible ? L’Oasis n°3 : Annoncer.
Pour évangéliser, il faut des moments où l’on s’explique entre soi et d’autres où l’on va vers des gens nouveaux. La Bible parle en plusieurs temps.
Certains moments sont plus faciles, d’autres plus difficiles.
Un dialogue aux frontières
En regardant une carte des pays de la Bible, on observe que la terre d’Israël est située au carrefour du monde ancien, au croisement des trois continents d’Afrique, d’Asie et d’Europe. Cela favorise les échanges et les rencontres : la migration d’Abraham (Genèse 12 : « Quitte ton pays »), le long séjour en Égypte, la dispersion en exil, les pèlerinages à Jérusalem. Petite entité au milieu de grands et fameux empires, juifs et chrétiens ont, en ce temps-là, toujours été en minorité dans le vaste monde. Même le petit village de Nazareth est à quelques kilomètres de la Via Maris, sorte d’autoroute ancienne qui parcourait tout le Croissant fertile, de l’Égypte à la Mésopotamie. Trop petits dans leurs frontières, les témoins de l’Alliance débordent sans cesse de leur territoire : Élie et Élisée accueillent Phéniciens (1 Rois 17) et Syriens (2 Rois 5). Dans l’évangile selon saint Jean, Jésus, baptisé de l’autre côté du Jourdain (1,28) multiplie les pains de l’autre côté de la mer de Galilée (6,22). On cherche donc le contact avec les autres qui sont loin.
Une expérience coûteuse
Il existe nécessairement des résistances au dialogue et à la rencontre. Par exemple, dans l’évangile selon saint Marc, le projet de Jésus est clair : aller de l’autre côté, sur l’autre rive (6,45). Les disciples sont fatigués et prennent peur (6,48-49). Ils reviennent donc au point de départ (6,53). Jésus retourne chez les païens pour multiplier du pain à nouveau (7,31 et 8,1-9) mais les disciples ne comprennent pas cette ouverture inattendue et se font réprimander (8,14-21).
Qui est du bon côté ?
Abraham, béni de Dieu, pense que les païens ne craignent pas Dieu (Genèse 20,11). En réalité, c’est Pharaon qui agit en bonne conscience alors qu’Abraham ment sur sa femme qu’il fait passer pour sa sœur (Genèse 12) ! Dieu invite ainsi Abraham à réviser son jugement sur ceux qui ne pensent pas comme lui !L’Égypte est du côté des persécuteurs dans l’Exode,mais elle est aussi une terre d’asile pour Joseph persécuté par ses frères (Genèse 39-50). La Sainte Famille y trouvera refuge à son tour (Matthieu 2). Le récit de Joseph en Genèse indique qu’un juif est tout à fait à sa place en Égypte, épousant une Égyptienne. Pourtant d’autres textes insistent sur la nécessité d’aller à Sion et d’observer la Loi dans la Terre promise et nulle part ailleurs (Deutéronome 12). Dieu nous invite à ne pas l’enfermer dans nos pensées et à le suivre.
Des décisions surprenantes et leurs conséquences
Au retour d’exil à Babylone, il semble qu’il faille purifier le rassemblement des enfants d’Israël de tout élément impur et on chasse les épouses venues de l’étranger en Esdras 9-10 ; on établit même la liste des coupables. Pourtant, dans le livre de Jonas, le prophète assiste à la conversion de Ninive, immense ville païenne.
Dans la généalogie de Jésus, selon saint Matthieu,on trouve Ruth qui est une étrangère. Moïse avait lui épousé une femme étrangère, une Madianite, autre peuple toujours en opposition à Israël. Étienne, un des premiers témoins de Jésus, dira que Moïse a été instruit dans toute la sagesse des Égyptiens (Actes 7,22) avant de devenir prophète en son peuple. De même, saint Paul connaît admirablement le monde juif et le monde grec. On estime enfin que son discours à Athènes est exemplaire d’un heureux témoignage chrétien dans une culture étrangère à l’Évangile (Actes 17, 22-34).
En conclusion, disons simplement que dans la rencontre de l’autre le « et » qui inclut est plus propice que le « ou », souvent exclusif.