« La question de la conversion, présente au cœur de la vie de chaque chrétien … »

beach-4011310_1280La question de la conversion est présente au cœur de la vie de chaque chrétien, de chaque communauté et de tous ceux qui viennent rejoindre nos communautés. Lors des rencontres d’été 2015 du SNCC, du 30 juin au 2 juillet 2015 à Paris, plusieurs intervenants ont nourri la réflexion des participants à ces trois journées. Voici le texte d’ouverture de ces Rencontres d’été, prononcé par Mgr Pierre d’Ornellas, président de la CECC. Ce texte est accompagné ici d’une proposition de travail en groupe.

Ouverture des rencontres d’été par Mgr Pierre d’Ornellas
(Texte complet et proposition de travail ici en PDF)

Conférence d’ouverture par Mgr Pierre d’Ornellas

La question de la conversion ne repose pas sur une opposition croyant/non-croyant mais sur la disposition de tout homme à écouter Dieu.

C’est Dieu qui dispose l’homme à l’écouter. C’est Dieu qui permet la conversion. Pour l’homme, la question est donc de consentir à l’écouter au sens biblique, c’est-à-dire à le laisser changer son cœur de pierre en cœur de chair. Cette attitude fondamentale de l’homme face à Dieu est découverte par Israël tout au long de son histoire.

C’est le cri des prophètes à travers l’Ancien Testament, jusqu’au dernier, Jean-Baptiste qui inaugure les quatre évangiles avec l’appel : « Convertissez-vous, car le Royaume de Dieu s’est approché » (Mt 3,1). Appel que Jésus reprendra en ouvrant son ministère par les mêmes mots (Mt 4,17). Cet appel évangélique et la disposition du cœur de l’homme que Dieu suscite entrent en écho avec le grand commandement donné à Israël : « Ecoute ».

Comment Dieu dispose-t-il le cœur de l’Homme ?

Pour illustrer les dispositions du cœur qui permettent d’entrer dans le Royaume, Mgr d’Ornellas nous a raconté le midrash sur Ex 24,31 – 24,7 – Dt 6,25, lorsque Israël reçoit la Loi et s’engage à la mettre en pratique. Le midrash commente que Dieu demande à Israël une garantie de son engagement : « Qui est le garant ? », demande Dieu « Nos pères. », répond le peuple. « Non, ils sont morts. » répond Dieu. « Qui alors ? », « Nos prophètes. », « Non, ils ne sont pas encore nés. Qui ? », Une mère se lève : « Nos enfants ! » « Oui, dit Dieu, car ils ne sont pas encore morts et ne sont pas dans le futur. Ils garantiront que vous mettrez mes commandements en pratique. » ((Chir Hachirim Rabah 1, 24, Yalkout Chimoni sur Jérémie 267, Kalah 2).

Être comme un enfant

Et Mgr d’Ornellas de nous évoquer ce que Jésus dit des tout-petits auxquels il faut ressembler pour entrer dans le Royaume. Un tout-petit dans la Bible est l’extrêmement pauvre, l’extrêmement fragile, celui qui s’en remet à Dieu. Le témoignage de sa confiance nous enseigne l’écoute de la Parole de Dieu.

La Bible ne parle pas des croyants et des non-croyants et le Concile Vatican II n’emploie jamais ces termes mais parle de l’humanité tout entière et de tout homme doté d’une conscience où brille la lumière de Dieu. Citant Gaudium et Spes, Mgr d’Ornellas a rappelé que « c’est d’une manière admirable que se découvre à la conscience cette loi qui s’accomplit dans l’amour de Dieu et du prochain » (GS 16.1)2 . Toute l’Ecriture reprend l’appel à la conversion manifestant qu’elle est un mouvement permanent de retour à Dieu pour l’homme, toujours tenté de se détourner de son Seigneur en qui seul se trouve la vie. Ainsi cet appel ne s’adresse pas aux seuls catéchumènes mais concerne tout homme, y compris les disciples du Christ. Car l’autre tentation est de croire que l’on est converti. Celui qui dirait « je suis converti » est « l’envers » du disciple et s’entendrait dire : « Passe derrière moi, Satan ». Le vrai disciple est toujours en état de conversion car il laisse grandir le tout-petit qui est en lui. Il apprend l’humilité. Cette loi de Dieu inscrite au cœur de chacun se manifeste par la recherche de la vérité et à son adhésion par ceux qui se soumettent à leur conscience. C’est la paresse du cœur qui conduit à ne pas chercher la vérité, à ne pas y adhérer et à ne pas suivre sa conscience. On ne peut alors pas parler d’opposition entre foi et non-foi. Non seulement Dieu inscrit sa loi dans la conscience mais c’est Lui qui en dévoile la présence. Dieu agit par une révélation comme en témoigne Saint Paul (Ep 3,3) ou comme Jésus le dit à Pierre quand il reconnaît en lui le Christ, le Fils du Dieu vivant : « Ce n’est pas la chair et le sang qui t’ont révélé cela, mais mon Père qui est aux cieux. » (Mt 16, 16-17).

Tout un vocabulaire traduit ce déchirement du voile du Temple dans le Nouveau Testament : révélation, manifestation, dévoilement ou en grec apocalypse.

En conclusion, nous pouvons méditer sur la conversion à partir de deux points :

1. Le vocabulaire qui accompagne la conversion

Le vocabulaire qui accompagne la conversion comme on le trouve en Luc 15 avec « la joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se convertit ». C’est la joie de Dieu. Ou encore en Luc 10,13, lorsque Jésus dit aux villes qui ne se sont pas converties : « Malheureuse es-tu, Corazine ! Malheureuse es-tu, Bethsaïde ! Car, si les miracles qui ont eu lieu chez vous avaient eu lieu à Tyr et à Sidon, il y a longtemps que leurs habitants auraient fait pénitence, avec le sac et la cendre. » Immédiatement après, sous l’action de l’Esprit Saint, Jésus tressaille pour les tout-petits : « 21 À l’heure même, Jésus exulta de joie sous l’action de l’Esprit Saint, et il dit : « Père, Seigneur du ciel et de la terre, je proclame ta louange : ce que tu as caché aux sages et aux savants, tu l’as révélé aux tout-petits. Oui, Père, tu l’as voulu ainsi dans ta bienveillance. » Mgr d’Ornellas souligne à nouveau cette disposition propre aux humbles de cœur, aux tout-petits pour accueillir le Royaume. Il existe un chemin de conversion, c’est le chemin normal de l’homme à qui Dieu parle et qu’Il met en disposition de l’écouter. Dans ce chemin résonne l’appel à la sainteté. Cela se fait petit à petit, en se laissant faire par Celui qui nous met sans cesse en état de le recevoir.

2. Le vocabulaire de la Révélation

Le dévoilement qui advient et qui est le dévoilement du visage de Dieu en Jésus. Certains « recommençants » disent : « je n’avais pas la foi et maintenant, je l’ai ». Ce n’est pas exactement de cela qu’il s’agit. Dieu ne donne pas à certains et pas aux autres. Il s’agit du mystère du dévoilement de Dieu qui se révèle. Au service de ce dévoilement, il y a le grand vocabulaire du témoignage. La Bible est un témoin entre vous et moi. « L’ignorance des Ecritures, c’est l’ignorance du Christ » dit saint Jérôme, repris par Dei Verbum dans son numéro 25 consacré aux catéchistes.3

Quand Jésus dit « Vous serez mes témoins » (Luc 24, 48), il s’adresse aux catéchistes, accompagnateurs, parents, enfants. Disciples qui s’ignorent peut-être mais qui sont dans une démarche de conversion. Dieu dévoile, révèle par l’Ecriture et par les témoins qui sont en état conscient de conversion. Gardons au cœur de notre session les paroles de Jean-Baptiste qui résonnent dans tout le Nouveau Testament : « Convertissez-vous, car le Royaume de Dieu s’est approché ».

Mgr Pierre d’Ornellas

  1. Ex 24,3 : Moïse vint rapporter au peuple toutes les paroles du Seigneur et toutes ses ordonnances. Tout le peuple répondit d’une seule voix : « Toutes ces paroles que le Seigneur a dites, nous les mettrons en pratique. »
  2. GS 16. Dignité de la conscience morale 1. Au fond de sa conscience, l’homme découvre la présence d’une loi qu’il ne s’est pas donnée lui-même, mais à laquelle il est tenu d’obéir. Cette voix, qui ne cesse de le presser d’aimer et d’accomplir le bien et d’éviter le mal, au moment opportun résonne dans l’intimité de son cœur : « Fais ceci, évite cela ». Car c’est une loi inscrite par Dieu au cœur de l’homme ; sa dignité est de lui obéir, et c’est elle qui le jugera. La conscience est le centre le plus secret de l’homme, le sanctuaire où il est seul avec Dieu et où sa voix se fait entendre. C’est d’une manière admirable que se découvre à la conscience cette loi qui s’accomplit dans l’amour de Dieu et du prochain. Constitution pastorale sur l’Eglise dans le monde de ce temps Gaudium et Spes, 1965 – accessible sur le site du Vatican (saisir « Gaudium et spes »)
  3. Dei Verbum 25. Recommandation de la lecture de l’Écriture Sainte. C’est pourquoi tous les clercs, en premier lieu les prêtres du Christ, et tous ceux qui s’adonnent légitimement, comme diacres ou catéchistes, au ministère de la parole, doivent, par une lecture sacrée assidue et par une étude approfondie, s’attacher aux Écritures, de peur que l’un d’eux ne devienne « un vain prédicateur de la Parole de Dieu au-dehors, lui qui ne l’écouterait pas au-dedans de lui » (…). Qu’ils se rappellent aussi que la prière doit aller de pair avec la lecture de la Sainte Écriture, pour que s’établisse un dialogue entre Dieu et l’homme, car « nous lui parlons quand nous prions, mais nous l’écoutons quand nous lisons les oracles divins ». Constitution dogmatique sur la Révélation divine Dei verbum, 1965 – accessible sur le site du Vatican (saisir « Gaudium et spes »)

 

Proposition de travail à partir de l’intervention de Mgr d’Ornellas

Réflexion sur la conversion et la mission des accompagnateurs-catéchistes.

Lire le texte d’ouverture de Mgr d’Ornellas en entier. Télécharger le texte en .pdf

  • Quelle disposition est nécessaire à la conversion ?
  • Reprendre Gaudium et Spes 16 : En quoi ce texte nous éclaire-t-il sur l’affirmation qu’il n’y a pas à opposer croyants/non-croyants ? Quelle est la vocation de l’homme ?

16. Dignité de la conscience morale

1. Au fond de sa conscience, l’homme découvre la présence d’une loi qu’il ne s’est pas donnée lui-même, mais à laquelle il est tenu d’obéir. Cette voix, qui ne cesse de le presser d’aimer et d’accomplir le bien et d’éviter le mal, au moment opportun résonne dans l’intimité de son cœur : « Fais ceci, évite cela ». Car c’est une loi inscrite par Dieu au cœur de l’homme ; sa dignité est de lui obéir, et c’est elle qui le jugera. La conscience est le centre le plus secret de l’homme, le sanctuaire où il est seul avec Dieu et où sa voix se fait entendre. C’est d’une manière admirable que se découvre à la conscience cette loi qui s’accomplit dans l’amour de Dieu et du prochain.

– Constitution pastorale sur l’Eglise dans le monde de ce temps Gaudium et Spes, 1965

  • A partir des deux points de conclusion de l’intervention de Mgr d’Ornellas : Quelles spécificités pointent-ils de la mission des catéchistes-accompagnateurs ? De quels moyens disposent ces derniers ? Dans votre pratique, comment mettez-vous en œuvre ou pourriez-vous mettre en œuvre ces points.

 

Approfondir votre lecture