Les récits apocalyptiques, des lectures pour aujourd’hui ?

Tenture de l’Apocalypse, vers 1373-1382, Angers

« Dans les milieux croyants, ces textes atypiques fascinent ou alors repoussent, mais il y a rarement de demi-mesure. » Avec la bibliste Elodie Verdun-Sommerhalter, nous partons à la re-découverte des récits du Livre de l’Apocalypse, particulièrement évoqués en temps de crise et d’épreuve, afin de cerner ce qu’ils ont à nous dire pour aujourd’hui. Elodie Verdun-Sommerhalter est intervenu sur ce sujet dans le cadre de la session Perspectives catéchétiques, « Celui qui a des oreilles, qu’il entende ce que l’Esprit dit aux Églises » (Ap 2,17a).

« Apocalypse » ou « apocalyptique » sont des termes qui reviennent de temps en temps à la mode… Par vagues, épousant les crises et les temps d’épreuves, les années aux chiffres symboliques. Ils réapparaissent lorsque les temps sont vécus comme difficiles, peu importe la quantification de douleurs par rapport aux épreuves du temps passés, l’avenir semble alors plus bouché que jamais. À quoi donc faisons-nous référence lorsque nous évoquons « l’Apocalypse » ? À ce (ou ces) livre(s) bibliques aux allures étranges et énigmatiques ? Dans les milieux croyants, ces textes atypiques fascinent ou alors repoussent, mais il y a rarement de demi-mesure. Et nous-mêmes, avons-nous finalement un jour pris le temps de les lire ? Cette petite heure biblique sera l’occasion de les redécouvrir et de proposer quelques repères.

En guise d’introduction, trois petites questions/mises au point :

Les récits apocalyptiques : des histoires à faire peur ?

18 % lors du sondage durant l’intervention.

Oui, c’est vrai. Les symboles employés, les bêtes hybrides et les monstres mythologiques décrites ont de quoi effrayer avec des oracles grandioses aux effets souvent terrifiants. Avouons que ces textes du genre apocalyptique ne sont guères choisis pour des partages bibliques, pour des études de textes avec des enfants… Parmi les biblistes catholiques, ils restent peu travaillés en comparaison à d’autres courants chrétiens. Peurs, mais je pense personnellement qu’il s’agit surtout de l’angoisse de ne pas trouver de réponses claires à chaque symbole ou image !

Pourtant, c’est aussi faux ! Ces textes ont été écrits dans des périodes, certes difficiles et angoissantes, mais justement pour vaincre la peur qui s’installait. Ce sont plutôt des écrits de résistance ! Alors si les témoins des visions eux-mêmes sont, eux aussi, parfois saisis d’angoisses, il ne faut pas avoir peur et lire les textes jusqu’au bout, jusqu’à la dernière ligne pour en saisir le mouvement et le dénuement !

Les récits apocalyptiques : des histoires hautes en couleurs ?

72 % lors du sondage durant l’intervention.

Vrai ! Il y a de la couleur en abondance dans les textes du genre apocalyptique. Alors que les autres récits bibliques sont avares de détails (vêtements, chevelures, etc – cf. les évangiles où finalement nous ne savons de l’aspect physique de Jésus sur quatre écrits que le détail de son habit était d’une tunique sans couture…), les récits apocalyptiques en regorgent. Tout y est description ! Tout y est mouvements et visions.

Un peu faux aussi… les scènes aux allures pittoresques sont autant de codes puisant dans la mémoire textuelle d’autres écrits bibliques, ou de lieux communs partagés avec d’autres cultures.

Les récits apocalyptiques : des histoires à dormir debout ?

9 % lors du sondage durant l’intervention.

Faux. Si le style apocalyptique nous questionne, nous effraie ou nous fait écarquiller les yeux de par leur étrangeté, rappelons-nous qu’ils n’étaient pas des « ovnis » en leur temps. Ils utilisent justement le langage de leur temps ; les symboles, les chiffres et les images qui façonnent les visions données à contempler ont leur cohérence et leur écho avec une situation connue de l’histoire. Si l’on entend « par histoire à dormir debout » la réalisation impossible du sens littéral des textes, notons d’emblée que « une telle démarche va à l’encontre de la nature même du livre. »1. L’étrangeté de ces récits leur ont causé du tort. Rappelons aussi au passage que le livre de l’Apocalypse de Jean, a eu du mal à intégrer le canon biblique. Cela a été la cause de discussions jusqu’au IVe siècle !

Un petit peu de vrai… Une des caractéristiques de ces récits sur laquelle nous reviendrons ultérieurement est qu’ils racontent comment un message a été transmis lors d’un songe ou d’une vision !

Quelques mots pour présentation de la démarche de cette « heure biblique » : Notre propos sera articulé en deux grandes parties :

I. SE CONFRONTER AUX TEXTES

Avant de passer dans une systématisation, ou un essai de compréhension de ce genre littéraire complexe, nous allons d’abord démarrer avec un temps de découverte de deux textes bibliques assez caractéristiques du genre apocalyptique.

II. LES GÈNES ET LES INGRÉDIENTS DE L’APOCALYPTIQUE BIBLIQUE

Cette seconde partie, plus réflexive et plus technique, tentera de brosser un tableau général de ce qui constitue un récit dit apocalyptique.

Nous clôturerons en nous questionnant sur la pertinence de ce genre, de cette dynamique pour aujourd’hui.

P.S. : dans ce document fourni après l’intervention sont ajoutés des liens renvoyant à quelques capsules vidéo sur Youtube.com permettant de compléter le propos et d’aller plus loin. Cliquer sur le logo bleu.

Elodie Verdun-Sommerhalter, bibliste, diocèse de Strasbourg

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