Baptisés, guidés par la lumière

La Transfiguration (détail). Mosaïque de Marko Rupnik, Chapelle du mausolée de St. Jean Paul II Washington.

Un peu de théologie, L’Oasis n°6 : Illuminés.

Dans l’espace et le temps, le Christ illumine la route de notre histoire.

Jour et nuit

Lorsqu’une personne vient au jour en naissant à la vie de Dieu et à la filiation par le baptême, l’Église lui remet la lumière prise au Cierge Pascal : « Que N., illuminé par le Christ, avance dans la vie en enfant de lumière et demeure fidèle à la foi de son baptême. Ainsi, quand le Seigneur viendra, N. pourra aller à sa rencontre dans son Royaume, avec tous les saints du ciel ». Lorsqu’une personne entrée dans la nuit de la mort est appelée à naître à la pleine Lumière de l’éternité, accomplissant sa vocation d’enfant de Dieu, l’Église lui partage la flamme du Cierge Pascal : « Nous ranimons cette flamme près de N., notre frère. Cette flamme qui vient de toi, Seigneur, lumière dans notre obscurité, qu’elle éclaire ce pas que nous avons à faire pour repartir dans l’espérance ».

Comme toute la vie chrétienne, l’Initiation (baptême/confirmation/ eucharistie) – selon une expression chère aux Pères de l’Église –, est une « illumination ». Le don de la lumière, avant d’être « un signe », est un rite. La lumière du baptême ou celle des funérailles, par le don d’un cierge allumé au Cierge Pascal décrit le cheminement et l’aventure d’une existence entre grâce et liberté qui traverse la nuit de la mort comme toute nuit. Commencé avant même l’Initiation chrétienne cet itinéraire de vie et de vérité est éclairé par l’Esprit Saint et sa puissance qui « nous prend sous son ombre » (Luc 1, 35) ! La lumière est Vie, elle donne vie ; mais elle est aussi connaissance, lumière qui éclaire l’esprit, lumière de l’Esprit-Saint ; elle est dynamique : c’est en cheminant qu’on peut le comprendre.

Une histoire du Salut éclairante

Le fondement biblique par excellence est la Pâque des hébreux. Pour qu’elle s’accomplisse « Le Seigneur lui-même marchait à leur tête : le jour dans une colonne de nuée pour leur ouvrir la route, la nuit dans une colonne de feu pour les éclairer ; ainsi pouvaient-ils marcher jour et nuit. Le jour, la colonne de nuée ne quittait pas la tête du peuple ; ni, la nuit, la colonne de feu » (Ex. 13, 21-22). Mais c’est à toutes les nuits, dans lesquelles Dieu accomplit son oeuvre de salut, qu’il faudrait se référer pour saisir le sens de la lumière qui alors éclaire et conduit, illumine et sauve, cela jusqu’à l’affirmation de Jésus lui-même : « Moi qui suis la lumière, je suis venu dans le monde pour que celui qui croit en moi ne demeure pas dans les ténèbres » (Jean 12, 46) car « au commencement était le Verbe… en lui était la vie, et la vie était la lumière des hommes ; la lumière brille dans les ténèbres… » (Jean 1, 1-5). Paradoxalement, c’est la nuit qui fait mieux saisir la force de ce qu’aujourd’hui vient nous faire vivre le rite de la lumière.

Cela va des ténèbres au moment de la création, lorsque le Souffle de Dieu agite les eaux et qu’une Parole qui crée est prononcée : « Que la lumière soit. Et la lumière fut » (Gn 1, 1), jusqu’à ce monde nouveau où alors « il n’y aura plus de nuit » (Ap 21,25). C’ est aussi dans la nuit que le Seigneur oeuvre par sa lumière, ainsi dans l’acte de la cène/passion/mort jusqu’au jour de la Résurrection. L’ensemble des alliances se déroulent de nuit, dans les ténèbres et font appel à la lumière, au feu, au jour pour faire passer à la pleine clarté du Jour du Seigneur.

La liturgie, chemin de lumière

A nous de prendre dès lors le chemin de la Vie, en traversant nos nuits et l’épaisseur de nos ténèbres, en nous laissant guider par tout rite de lumière dans l’Église ; que ce soit dans les sacrements et sacramentaux (les consécrations et bénédictions, mais aussi les objets bénits, eau bénite, médailles sont des sacramentaux) ; mais aussi par le Rite de la lumière que nous fait vivre la Vigile pascale et cette colonne de feu qu’est le Cierge Pascal, accompagné par le chant qui proclame « Lumière du Christ » et suivi par les chrétiens tenants leur cierge allumé. En ce cœur, rite de lumière par excellence, se greffe la lumière du lucernaire3 des vêpres lorsque le célébrant allume le cierge du sanctuaire en chantant « Joie et lumière de la gloire éternelle du Père… » ou encore de la procession de « la chandeleur » lors de la fête, le 2 février, de la Présentation du Seigneur au Temple. La liturgie des heures déploie sur une journée un chemin de lumière par le chant du Cantique de Zacharie aux laudes et jusqu’au Cantique de Siméon aux complies. Du jour à la nuit, du matin en chantant : « quand nous visite l’astre d’en haut, pour illuminer ceux qui habitent les ténèbres et l’ombre de la mort, pour conduire nos pas au chemin de la paix » à la nuit quand nos voix s’élèvent pour confesser : « mes yeux ont vu le salut que tu préparais à la face des peuples : lumière qui se révèle aux nations ».

Dans l’espace et le temps, la lumière tout au long de l’année, de la nuit de Noël aux flammes de Pentecôte illuminera cette route de l’existence ; la lumière à travers les vitraux viendra en dire le jeu d’ombre et de clarté et le dimanche, jour de la lumière (sunday) en poser le sceau.

Père Bernard Maitte, Directeur adjoint de l’Institut universitaire S. Luc (IUSL) d’Aix.
Membre du Service National de Pastorale Liturgique et Sacramentelle.

1 Rituel du baptême des petits-enfants n°142, on trouve l’équivalent pour les adultes dans le Rituel de l’initiation chrétienne des adultes au n°227.

2 Rituel des funérailles n°55.

3 Lucernaire

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