Enquête européenne sur l’initiation chrétienne : état des lieux en 2012
Au cours de ces derniers mois, le groupe de travail qui a préparé le Congrès a effectué un sondage sur l’initiation chrétienne en Europe, avec l’aide de divers responsables nationaux de la catéchèse des Conférences épiscopales : au total, plus de 3600 personnes ont été interviewées (enfants, adolescents, parents et/ou grands-parents), représentant un bon échantillon de la perception que les directs intéressés (et leurs parents) ont de leur initiation chrétienne.
Résultats du sondage européen sur l’initiation chrétienne en Europe
L’expérience de foi commence par une rencontre avec Jésus-Christ ressuscité présent et vivant, que l’on peut sentir et toucher dans l’Église, son Corps mystique. Cette expérience est accessible à tous, et donc aussi aux enfants et aux adolescents. Toutefois, la rencontre avec le Christ vivant passe toujours par une rencontre personnelle et communautaire avec ceux qui ont accueilli le don de la foi. L’Église, consciente d’être la gardienne d’un trésor, a toujours insisté sur l’importance de communiquer la foi aux nouvelles générations. Cette transmission est appelée catéchèse. La récente enquête effectuée en vue de ce congrès a mis en lumière les aspects positifs et ceux qui ont besoin d’être revus afin de mieux répondre à sa mission de proclamer l’Évangile et de former des chrétiens capables de vivre leur foi dans toutes les dimensions de leur vie. Bref, cette enquête indique un parcours qui reste encore à faire.
Les éléments recueillis par l’enquête et les observations ont permis d’identifier les points déterminants: tout d’abord, le milieu de vie et son influence sur l’initiation de l’enfant chrétien ; ensuite, la communauté chrétienne, ses membres et sa vie liturgique ; et enfin, l’importance pour l’enfant de suivre une démarche personnelle dans son initiation chrétienne.
Principaux éléments mis en lumière par ce sondage
A propos du milieu de vie …
La famille – avant tout les parents, mais aussi les frères et sœurs et les grands-parents – est le cadre naturel de l’initiation de l’enfant. D’autres membres de la famille, y compris les oncles et tantes, cousins et cousines, ou encore les parrains et marraines, sont aussi cités, mais moins fréquemment.
La famille est le premier milieu où l’enfant construit sa relation avec la réalité, et donc aussi avec Dieu et avec l’Église. Les réponses indiquent que la pratique religieuse dans la famille est le premier facteur susceptible de favoriser l’initiation chrétienne. Vivre en famille la messe du dimanche et les fêtes liturgiques, notamment Noël et de Pâques, est un facteur décisif, même pendant l’adolescence quand certains jeunes ont tendance à négliger la pratique religieuse.
La famille est une communauté de vie où l’enfant fait l’expérience de la présence de Dieu par la parole et l’exemple de son entourage (témoignage). En revanche, lorsque la foi n’est pas une réalité du quotidien de la famille, l’expérience religieuse des enfants s’en trouve influencée négativement. La famille est parfois présentée comme un milieu systémique dont chaque membre interagit avec les autres et où l’initiation chrétienne ne se limite pas à l’initiation de l’enfant par ses parents. Ainsi, l’initiation des enfants peut aussi susciter des questionnements chez ses parents et ses frères et sœurs, en les incitant à se rapprocher de la pratique religieuse.
La participation de la famille aux rencontres catéchétiques est souvent indiquée comme facteur positif.
Les amis. Les liens d’amitié jouent également un rôle fondamental. Les amis constituent le deuxième groupe de personnes le plus souvent cité, soit comme témoins de foi, soit comme responsables d’un éloignement. Ainsi les enfants souhaitent participer à la messe du dimanche quand elle leur donne aussi l’occasion de rencontrer leurs amis. Inversement, si leurs amis ne vont pas à la messe, cela devient pour eux une obligation peu attrayante. Le sondage montre combien il est important pour les enfants, les adolescents et les jeunes de pouvoir vivre leur foi avec d’autres jeunes de leur âge.
L’influence de l’école dépend beaucoup du contexte (notamment s’il s’agit d’une école catholique ou d’une école publique). Elle peut jouer un rôle en promouvant non seulement le dialogue et les discussions, mais parfois aussi l’initiation chrétienne.
D’après les personnes interrogées, les écoles privées catholiques jouent en général un rôle positif dans l’initiation chrétienne de l’enfant, en leur proposant un environnement marqué par une claire identité chrétienne, où les signes et les messages chrétiens sont présents, où la rencontre avec la culture chrétienne ne se fait pas seulement pendant les cours de religion ou les classes de catéchèse, mais dans l’enseignement des différentes matières et aux divers moments de célébration de l’année. Dans ce contexte, le sondage met en évidence le rôle important que peuvent jouer les professeurs, avec leur personnalité, pour introduire les enfants à la vie de l’Église et à un rapport personnel avec Dieu.
Les réponses au questionnaire révèlent que l’éloignement de la foi qui se produit le plus souvent pendant l’adolescence peut être dû non seulement au fait que la majorité des camarades de classe ne la partage pas – l’isolement est toujours un facteur dissuasif -, mais aussi à la pression du travail scolaire et des devoirs.
Les activités des groupes et les mouvements sont également importants, puisqu’ils constituent l’un des principaux moyens pour faire participer les enfants et les adolescents à la foi chrétienne. Nombre d’adolescents et de jeunes soulignent la nécessité et l’utilité de participer à des actions concrètes, pratiques dans les groupes dont ils font partie, sans se limiter aux moments de discussion et de réflexion.
Nombreux sont en outre ceux qui estiment que la rencontre avec des points de vue différents (personnes d’autres religions, discussions avec des adultes, avec les membres d’autres cultures lors des rassemblements, etc.) est importante. Et si les autres, la société dans son ensemble et les points de vue différents peuvent entraîner une remise en question la foi chrétienne (impact d’une société sécularisée et quelquefois antireligieuse, prise de conscience qu’il existe d’autres religions, que la science peut apporter d’autres réponses aux questions qu’ils se posent), ils sont souvent aussi une occasion pour approfondir les raisons de leur foi.
Au sujet de la communauté …
La communauté chrétienne joue un rôle décisif dans la vie et le parcours de foi des enfants et des adolescents. La notion de communauté est souvent évoquée par les interviewés, qui soulignent l’importance de faire partie d’une communauté et de vivre une vraie vie de communauté.
L’identité chrétienne est une question qui revient souvent : il est important de se reconnaître comme chrétien, comme faisant partie d’une communauté. Certaines réponses insistent aussi sur l’importance pour les enfants et les adolescents de rencontrer des chrétiens, des prêtres, des professeurs, des personnes qui jouent un rôle actif dans les organisations caritatives, etc., des personnes engagées et des témoins. La catéchèse, l’aumônerie ou les cours de religion (ou équivalents) sont toujours cités parmi les facteurs qui favorisent l’initiation chrétienne.
L’importance donnée à la catéchèse (et autres activités vécues dans la paroisse ou dans un milieu ecclésial) diffère selon les pays. Les cours de religion sont parfois jugés ennuyeux, à la différence des groupes de catéchèse. Certains supports, comme les récits ou le matériel audiovisuel, sont jugés plus intéressants pour l’enfant, plus stimulants. Si les personnes interrogées ne parlent guère du contenu de la catéchèse en lui-même, il convient néanmoins de s’interroger sur la meilleure façon de communiquer la connaissance de Jésus et la doctrine de l’Eglise de façon captivante et significative.
La vie liturgique occupe une place fondamentale dans l’initiation chrétienne et dans la vie de la communauté comme lieu privilégié de rencontre avec le Dieu vivant. Elle renforce les liens spirituels entre les membres de l’Église, et entre ces derniers et Dieu. L’enquête montre que la manière de célébrer la foi peut être soit un encouragement, soit un facteur d’éloignement de la religion. D’où l’importance de soigner les célébrations liturgiques, et en particulier la messe, pour qu’elles soient un lieu de rencontre avec le Dieu vivant, et n’apparaissent pas ennuyeuses ou contraignantes. L’importance de comprendre sa foi, de saisir ce qui est dit pendant la messe, de la suivre en ayant conscience de ce qui se passe, est également un point qui revient souvent dans les réponses.
Les sacrements et la préparation aux sacrements, notamment ceux de la première communion et de la confirmation, (en groupe ou individuellement) en vue de l’initiation chrétienne des enfants et des adolescents sont jugés plus ou moins importants selon les pays. La célébration des sacrements des enfants est un moment décisif dans la vie de la communauté et des familles chrétiennes, mais elle doit être vécue aussi comme une démarche personnelle. Le sacrement de la réconciliation est considéré comme un moment très important pour les enfants et les adolescents qui font l’expérience du pardon de Dieu et se sentent accompagnés personnellement dans leur parcours de foi.
A propos du cheminement personnel …
Le risque de la liberté. Tant les enfants que les adolescents insistent sur l’importance d’une démarche qui soit personnelle sans être individualiste. Les adolescents et les jeunes disent que le passage à l’adolescence est à la fois une période de remise en question (de leur foi et de toutes leurs certitudes) et de prise de conscience de leur foi. C’est un moment de liberté où chacun est appelé à accepter consciemment ce qui lui a été communiqué et à découvrir personnellement les raisons de dire « oui » à Dieu. Cela peut se traduire par un éloignement de la pratique chrétienne, ou au contraire par un désir de participation accrue, par une foi plus « active ».
L’adolescence est aussi un temps d’appropriation personnelle, en particulier par rapport la famille. Les jeunes soulignent l’importance d’interpréter leur foi non pas comme une chose appartenant à leurs ascendants, mais comme un choix personnel qui remplit leur vie sans rien lui enlever. Les jeunes choisissent parfois de fréquenter une autre paroisse que celle de leur famille pour être avec leurs amis.
Un temps de questionnement. Les jeunes se trouvent confrontés à un certain nombre de questions essentielles : existence de Dieu, souffrance, vie après la mort, bien et mal, etc. Si la foi ou la catéchèse ne les aide pas à trouver des réponses et n’accompagne pas leur questionnement, les jeunes peuvent éprouver une déception et s’éloigner de la religion. C’est donc un grand défi pour la catéchèse : être capable de montrer aux jeunes la beauté d’une vie de foi, l’actualité des raisons de la foi, et l’expérience de l’amour de Dieu révélé dans la personne vivante de Jésus. Ainsi les jeunes se sentiront plus déterminés à s’engager et se montreront plus disponibles vis-à-vis des autres. La foi devient charité quand ses racines sont solides.
Nombre de jeunes qui se sont éloignés de la foi disent qu’ils n’ont pas trouvé de réponse aux questions qu’ils se posent et qu’ils n’ont rencontré personne qui puisse les aider. Le sondage montre en outre que les évènements personnels tristes ou joyeux (décès ou bonne nouvelle), ou encore une grande rencontre avec d’autres jeunes, peuvent jouer un rôle important dans le cheminement chrétien des jeunes.
En France
Le père Luc Mellet, directeur du SNCC, est intervenu le lundi 7 mai 2012, au XIIe Congrès européen pour la catéchèse à Rome, au sujet d’une enquête européenne menée ces derniers mois sur l’initiation chrétienne. Voici ici une synthèse de l’enquête menée en France en 2011 auprès d’enfants et de jeunes entre 6 et 17 ans.