Méditation sur la route de Jérusalem à Emmaüs ou l’art de devenir témoins de la Résurrection
Une méditation pour prolonger la lecture de l’évangile de Luc avec les disciples d’Emmaüs. Le Christ Ressuscité rejoint Cléophas et son ami pour leur ouvrir les yeux grâce aux Écritures et au partage du pain. Cette proposition s’adresse aux catéchumènes, confirmands et catéchistes… pour découvrir que nous pouvons, en accueillant le Ressuscité avec les yeux de la foi, devenir des porte-paroles de la bonne nouvelle du salut.
Dans cette période si particulière de confinement, nous sommes invités à nous saisir des textes bibliques avec une avidité nouvelle, pour nous en nourrir à l’heure où nous sommes sevrés du pain eucharistique. L’Écriture peut nous aider à creuser le mystère de Dieu, pour en vivre, pour qu’elle devienne nourriture subsistante et que nous puissions nous en faire les porte-parole.
Pour goûter toutes les richesses du texte des disciples d’Emmaüs, il faut emprunter le même chemin que les disciples, comparable à celui du deuil et d’une naissance à la vie nouvelle.
Commençons brièvement par nous redire le contexte proche :
Au chapitre 23, nous avons le procès de Jésus, sa condamnation où Pilate redit par trois fois : « Quel mal a donc fait cet homme ? Je ne trouve chez cet homme aucun motif de condamnation1 », puis la Passion, la mort et la mise au tombeau qui s’achève sur la fidélité des témoins de la croix.
Le chapitre 24 conclut l’évangile de Luc et constitue l’ouverture au livre des Actes des Apôtres.
Lc 24, 1-3 : « Le premier jour de la semaine, à la pointe de l’aurore, les femmes se rendirent au tombeau, portant les aromates qu’elles avaient préparées. Elles trouvèrent la pierre roulée sur le côté du tombeau. Elles entrèrent, mais ne trouvèrent pas le corps du Seigneur Jésus. »
– On y trouve toute l’insistance sur le corps mort de Jésus : la tombe, le tombeau, le corps du Seigneur Jésus… et l’identification des témoins : Marie de Magdala, et Jeanne et Marie mère de Jacques (Lc 24, 10) qui rapportent aux Apôtres ce qu’elles ont vu.
Lc 24, 11-12 : « Mais ces propos leur semblèrent délirants, et ils ne les croyaient pas. Alors Pierre se leva et courut au tombeau ; mais en se penchant, il vit les linges, et eux seuls. Il s’en retourna chez lui, tout étonné de ce qui était arrivé. »
– On notera l’insistance sur la vision (« il vit ») qui ne conduit pas à un croire les paroles rapportées ni à ce que la vision semble signifier. Sur cette incrédulité s’ouvre le récit des pèlerins d’Emmaüs.
Nous vous proposons maintenant de prendre le temps de lire le récit des pèlerins d’Emmaüs : du verset 13 jusqu’au 34. Lire en portant attention aux mots, au rythme, aux verbes, aux indications de lieux et de temps, aux personnages. Lire comme si nous lisions ce texte pour la première fois, sans nous précipiter sur une interprétation a priori du récit. Essayons également de nous rendre présents à l’événement, en fermant les yeux, en prenant la route de Jérusalem à Emmaüs, pour sentir et ressentir les émotions des protagonistes.
Prenons le temps de mettre un pied devant l’autre :
Lc 24, 13-14 : « Le même jour, deux disciples faisaient route vers un village appelé Emmaüs, à deux heures de marche de Jérusalem, et ils parlaient entre eux de tout ce qui s’était passé. »
- Quand a lieu le récit ?
- Quel est ce jour dont parle Luc ? Relire le début du verset 1. Que désigne ce premier jour de la semaine ?
- Qui sont les personnages ? Que font-ils ?
L’art de Luc : il situe ce récit dans la continuité de ce qui précède avec la mention « le même jour » qui, pour nous, désigne le 8ème jour, jour de la Résurrection : nous sommes bien dans un temps nouveau, qui rompt avec tout ce qui précède, tout ce que nous connaissions jusqu’à présent et qui inaugure comme le temps d’une recréation.
« Deux disciples » : qui ? Allusion évidente aux compagnons qui étaient avec les Onze quand les femmes sont venues rapporter ce qu’elles avaient vu ou plutôt n’avaient pas vu : ils les ont entendues. On peut penser que c’est précisément ce qui occupe leurs échanges.
Où vont-ils ? A Emmaüs, distant de 60 stades ou deux heures de marche, autrement dit ce n’est pas la porte à côté ! Il faut du temps pour y parvenir : la notion de temps est fondamentale et nous y reviendrons.
Que quittent-ils ? Jérusalem… autrement dit le lieu de tous leurs espoirs déçus : l’attente dont ils avaient chargée Jésus, celui d’être le libérateur d’Israël. Ils quittent le lieu de leur échec, c’est douloureux et cela s’est passé à Jérusalem, lieu du temple, de la présence de Dieu. C’est terrible. Ils rentrent chez eux pour reprendre le cours de leur vie d’avant, avec un goût de cendres dans la bouche. Et cela occupe toute leur discussion : ils doivent remâcher ce qu’ils y ont vécu. Parlent-ils de lui, de ce que Jésus a vécu, souffert ? Le texte ne nous le dit pas. Nous ne pouvons que le supposer.
Lc 24, 15-16 : « Or, tandis qu’ils s’entretenaient et s’interrogeaient, Jésus lui-même s’approcha, et il marchait avec eux. Mais leurs yeux étaient empêchés de le reconnaître. »
- Quel est l’élément nouveau du texte ? De quelle précision sur Jésus est-il fait mention ? Que fait-il ? Que peut-on en conclure sur la résurrection de Jésus ?
- Comment comprenez-vous la phrase : « mais leurs yeux étaient empêchés de le reconnaître » ?
Jésus, en personne se fait proche : pas un esprit, on n’est pas dans une expérience mystique : c’est le corps de Jésus qui s’approche, c’est vraiment lui. Et pourtant leurs yeux sont comme empêchés de le reconnaître. Que se passe-t-il pour qu’ils ne le reconnaissent pas alors qu’ils sont des compagnons de Jésus ? Sont-ils tellement à leur douleur qu’ils sont incapables de voir autre chose ? Ou peut-être faut-il bien déjà se dire que la Résurrection offre à voir un Jésus qui n’est plus tout à fait le même, tout en restant le même… Étrange paradoxe de la Résurrection.
Mais retenons d’ores et déjà que c’est le Christ qui les précède, les rejoint, là où ils en sont, au cœur de ce qui fait problème. Le Christ n’attend pas que nous soyons disposés : il est déjà là. Comme il l’avait dit : « là où deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis là, au milieu d’eux2 ». Et il fait route avec eux. Merveille de le voir marcher avec ceux qui peinent. Non seulement il les rejoint mais partage le chemin. Il n’y a aucune violence dans sa manière de procéder, il se met à leur rythme.
Lc 24, 17-18 : « Jésus leur dit : ʺDe quoi discutez-vous en marchant ? ʺ Alors, ils s’arrêtèrent, tout tristes. L’un des deux, nommé Cléophas, lui répondit : ʺTu es bien le seul étranger résidant à Jérusalem qui ignore les événements de ces jours-ci.ʺ »
- Pourquoi Jésus les interroge-t-il ?
- Quelle réaction provoque la question de Jésus ?
- Quel sens a la réponse de Cléophas ?
Jésus a l’initiative du dialogue : il s’enquiert de ce qui se passe et prend le risque de la réponse, brutale il faut l’admettre. Cela les saisit car ils s’arrêtent de marcher, tout tristes.
Nous avons la mention du nom d’un des deux, Cléophas et pas l’autre. Pourquoi l’un et pas l’autre si ce n’est pour nous permettre, peut-être, de nous identifier au deuxième ? Quoi qu’il en soit ils ne le reconnaissent pas. Les événements qui viennent de s’achever ont certainement dû avoir une grande répercussion dans la ville ; nul n’a pu y échapper.
Lc 24, 19a : « Il leur dit : ʺQuels événements ? ʺ »
- Pourquoi Jésus pose-t-il cette question ?
Jésus ne se laisse pas émouvoir par la remontrance, il relance le dialogue, les obligeant à en faire le récit. Et c’est précisément là que ça devient intéressant : une chose est de vivre les événements, une autre est de les raconter. Cela oblige à rassembler sa pensée, à choisir les mots, à les organiser. Et c’est ce qu’ils font admirablement bien. Retenons la manière de faire de Jésus : après avoir pris le temps de les rejoindre, de partager le quotidien de ce qu’ils vivent – la marche – il s’intéresse à eux et les met dans une histoire.
Lc 24, 19b-24 : « Ils lui répondirent : ʺCe qui est arrivé à Jésus de Nazareth, cet homme qui était un prophète puissant par ses actes et ses paroles devant Dieu et devant tout le peuple : comment les grands prêtres et nos chefs l’ont livré, ils l’ont fait condamner à mort et ils l’ont crucifié. Nous, nous espérions que c’était lui qui allait délivrer Israël. Mais avec tout cela, voici déjà le troisième jour qui passe depuis que c’est arrivé. À vrai dire, des femmes de notre groupe nous ont remplis de stupeur. Quand, dès l’aurore, elles sont allées au tombeau, elles n’ont pas trouvé son corps ; elles sont venues nous dire qu’elles avaient même eu une vision : des anges, qui disaient qu’il est vivant. Quelques-uns de nos compagnons sont allés au tombeau, et ils ont trouvé les choses comme les femmes l’avaient dit ; mais lui, ils ne l’ont pas vu. »
- Que racontent les deux disciples ? A quoi cela vous-fait-il penser ?
- Qu’est-ce qui est dit de Jésus ?
- De quelle manière les disciples s’impliquent-ils dans le récit qu’ils font ?
Magnifique moment que celui de leur récit ! Tout y est et… rien ne fait sens.
Relevons quelques mots : Jésus le Nazaréen : il s’agit bien d’une personne identifiée, connue, historiquement située.
Un prophète puissant en œuvres et en paroles devant Dieu et devant tout le peuple : il n’était pas perçu comme un homme comme les autres.
Les grands prêtres, nos chefs… : c’est bien une histoire dont ils sont les protagonistes. Ils sont pleinement engagés dans cette histoire. Le récit, sobre, de la Passion et de la mort. Sans détail mais qui dit toute l’horreur. Ils avaient espéré qu’il serait ce libérateur, celui qui briserait le joug de l’occupation et restaurerait Israël dans toute sa suprématie. Un messie à vue humaine. La déception est à la hauteur de l’espoir.
Qui plus est cela fait trois jours que ces événements se sont produits : trois jours, c’est le temps pour que la mort fasse son œuvre. Ce n’est qu’au bout de trois jours que l’on considérait les personnes comme vraiment mortes. Cette mention est essentielle pour comprendre que, avant la joie de Pâques, il y a la fin que la mort nous signifie. Jésus n’a pas fait semblant.
Et la mention de l’échec, cinglant, du témoignage : pourtant tout y est : la précision « dès l’aurore », une certaine fiabilité du témoin « des femmes de notre groupe » donc pas simplement des femmes quelconques. Celles qu’ils connaissent et dont on peut supposer qu’ils leur portent un minimum de crédit. On dit trop vite que ce ne sont que des femmes et donc que leur témoignage n’a pas de valeur (notamment au regard de la loi qui faisait uniquement des hommes des témoins valides) mais, déjà, ce qu’elles rapportent les a stupéfiés… mais pas convaincus.
Il faut dire que le saut de la foi est conséquent : elles étaient parties voir un corps, mort, dans le tombeau et elles ne trouvent pas ce corps, elles voient des anges qui leur disent qu’il est VIVANT ! Quand leur attente était focalisée sur le destin corruptible d’un corps, elles ont la définition de la Résurrection : « Il est VIVANT ! ». Peut-être, parfois, nous sourions un peu trop vite de la naïveté des femmes qui n’ont pas cru les anges, des disciples qui n’ont pas cru les femmes mais, l’expérience rapportée n’est si évidente ! Peut-être aurions-nous éprouvé les mêmes difficultés à recevoir cette parole. Quand on lit les sondages récurrents sur la foi en la Résurrection, on ne peut que constater que c’est toujours difficile de croire que celui qui est mort a été relevé et est Vivant. Et ils en rajoutent : « quelques-uns de nos compagnons » (des hommes cette fois) sont allés vérifier les choses et ils les ont trouvées conformes à ce qui avait été dit mais ils n’ont pas cru qu’il était vivant. »
Admirable proclamation du cœur de la foi : Jésus le Nazaréen a été crucifié, est mort. Dieu l’a ressuscité et il est vivant parmi nous. Les disciples en sont témoins (ce qu’on appelle Kerygme). Mais proclamation qui échoue à faire sens pour des yeux que la foi n’a pas rendus actifs. Il y a bien une sidération suite à l’échec. Et avant de croire, il faut probablement faire le deuil des représentations que nous avons – parfois inconscientes mais certainement tenaces – de Dieu. Pour eux, Dieu a échoué. Ils ne voient pas que le signe de la victoire est entièrement dans le Vivant qui renverse le cours des choses. Ils ne perçoivent pas que la seule vision requise est celle qui mobilise le cœur3 comme dit remarquablement Antoine de Saint-Exupéry.
Lc 24, 25-27 : « Il leur dit alors : ʺEsprits sans intelligence ! Comme votre cœur est lent à croire tout ce que les prophètes ont dit ! Ne fallait-il pas que le Christ souffrît cela pour entrer dans sa gloire ?ʺ Et, partant de Moïse et de tous les Prophètes, il leur interpréta, dans toute l’Écriture, ce qui le concernait. »
- Quelle est la réaction de Jésus au récit des disciples ? Pourquoi une telle réaction ?
- Que fait ensuite Jésus ? Quelle importance revêtent ces phrases de Jésus pour nous ?
La situation a quelque chose de comique non ? Jésus, ressuscité, écoute ses disciples lui raconter ce qui lui est arrivé ! Qu’est-ce à dire ? Que Jésus ne néglige pas d’écouter ce que nous avons à dire de lui, quand bien même les mots que nous prononçons sur lui ne sont pas justes. Le récit que les disciples font à Jésus ne peut, finalement, les conduire qu’à la mort de leurs espoirs. Pourquoi ? Parce qu’ils attendaient un messie à vue humaine et pas la révélation sur Dieu que la croix expose.
Alors évidemment Jésus les enseigne avec l’autorité qui s’exprime sous forme de remontrance : « Esprits sans intelligence » Que leur raconte ensuite Jésus ? Le récit ne le dit pas : autant les mots des disciples étaient précis pour dire le kérygme qui échoue, autant les mots se dérobent pour dire le dessein de salut de Dieu manifesté dans la Résurrection de son Fils. On sait seulement que Jésus retrace le parcours des Écritures. Les mots que Jésus a utilisés pour leur dire sa Résurrection nous sont pour le moment cachés (ils seront dévoilés dans la suite du chapitre, quand les Onze seront devenus des témoins et qu’ils pourront proclamer la Résurrection). Mais notre situation n’est pas tout à fait analogue à celle des deux disciples d’Emmaüs : nous connaissons la fin, avec l’aide de l’Esprit et nous comprenons déjà, à ce stade du récit, que la présence du Ressuscité se vit pour nous aujourd’hui par la Parole de Dieu faite chair en Jésus. Si nous voulons être des témoins fidèles et crédibles, il nous faut être des fidèles de l’Ecriture, il faut qu’elle nous accompagne sur nos chemins. Demandons-nous : est-ce que je vis de la Parole de Dieu ? Est-elle pour moi nourriture et présence du Christ ressuscité ?
Jésus leur fait prendre de la hauteur, quitter leur registre terre-à-terre de compréhension des événements : il leur explique la cohérence du dessein de salut de Dieu qui passe par la Croix. Croix et Résurrection appartiennent toutes deux à la Révélation de son amour pour tous, irrévocablement, et place Jésus comme médiateur absolu de ce mystère.
Lc 24, 28-29 : « Quand ils approchèrent du village où ils se rendaient, Jésus fit semblant d’aller plus loin. Mais ils s’efforcèrent de le retenir : ʺReste avec nous, car le soir approche et déjà le jour baisse.ʺ Il entra donc pour rester avec eux. »
- Pourquoi Jésus fait-il semblant d’aller plus loin ?
- Qu’est-ce qui a motivé, chez les disciples, une telle prévenance à l’égard de celui qu’ils considéraient comme un étranger au début du récit ?
- Que fait Jésus ?
Quelle délicatesse ! Celui qui enseigne est prêt à se retirer. Il ne s’impose pas et les laisse libres de l’inviter à rester. Et cet enseignement a dû prendre du temps puisque les voilà rendus, à l’approche du soir, aux portes d’Emmaüs. Mais ce qui a été dit les a bousculés au point de les provoquer à l’hospitalité. Quand nous l’invitons à rester, le Seigneur nous faire la grâce de demeurer avec nous.
Lc 24, 30-31 : « Quand il fut à table avec eux, ayant pris le pain, il prononça la bénédiction et, l’ayant rompu, il le leur donna. Alors leurs yeux s’ouvrirent, mais il disparut à leurs regards. »
- Quels sont les gestes que Jésus fait ? Noter les quatre verbes.
- Que provoquent les gestes et la parole de Jésus ?
Les quatre verbes ici mentionnés activent la mémoire des disciples : prendre – dire la bénédiction – rompre et donner (ce sont les mêmes verbes que ceux que nous rapporte le récit de la Cène en Luc 22, 19-20). Forcément il en fut de même pour eux comme il en est pour nous à chaque eucharistie : les gestes et la parole nous rendent présents à l’événement.
Le texte renverse complètement ce qui jusqu’à présent avait été dit des disciples : là où leurs yeux étaient empêchés, désormais ils contemplent le Ressuscité : ils le reconnurent. Et la disparition est concomitante à la reconnaissance : dès lors que nous voyons avec les yeux de la foi, nous n’avons plus besoin de voir avec nos yeux de chair – c’est ce qu’affirme le récit de l’apparition à Thomas dans l’évangile selon saint Jean. Mais plus profondément : quand nous communierons, le Seigneur ressuscité se fera plus intime à nous-mêmes que nous-mêmes, nous lui serons incorporés. Son œuvre de salut se fait dans notre chair même. Et seul le Seigneur peut nous faire faire le saut de la foi.
Lc 24, 32-33a : « Ils se dirent l’un à l’autre : « Notre cœur n’était-il pas brûlant en nous, tandis qu’il nous parlait sur la route et nous ouvrait les Écritures ? » À l’instant même, ils se levèrent et retournèrent à Jérusalem. »
- Que provoque cette reconnaissance ?
Le Seigneur leur permet de se rejoindre et d’avoir une communion de parole.
Et les disciples soulignent le cœur brûlant du partage de la Parole. Nous sommes à leur suite invités à partager la Parole et l’Esprit Saint que nous recevrons au baptême et à la confirmation nous y aidera. Viendra le temps, opportun pour le Seigneur, d’être convié à sa table mais déjà la communion est possible.
Le récit s’achève dans un retour sur le lieu de départ qui, de lieu de mort, devient lieu de l’annonce de la Résurrection. Ils sont même précédés puisque lorsqu’ils arrivent auprès des Onze, ce sont ces derniers qui ont l’initiative de la Parole : « Ils y trouvèrent réunis les onze Apôtres et leurs compagnons, qui leur dirent : ʺLe Seigneur est ressuscité : il est apparu à Simon-Pierreʺ ». C’est de Jérusalem que la Parole va partir jusqu’aux confins de la terre. C’est du lieu même de la présence de Dieu que le message du salut va se répandre dans toutes les nations.
Pour les catéchumènes en attente du baptême, comment aller plus loin avec cet évangile ?
Comment est-ce que je vis ce temps de report de mon baptême : quels mots, quelles images peuvent dire ce que je ressens ? Je le partage à Jésus.
Je me remémore les moments où j’ai fait l’expérience de Jésus qui se fait proche. Quelles ont été les étapes importantes de mon chemin de foi ?
Qu’est-ce que je comprends du mystère de l’Eucharistie à travers ce passage ? Est-ce que je prends déjà conscience que le Seigneur me nourrit par sa Parole ?
Que comprendre de la résurrection ? Qu’elle fait de nous des témoins.
La découverte de la Résurrection de Jésus commence toujours par une incompréhension. L’expérience est inatteignable à notre seule raison : seule la foi peut nous y conduire. Renonçons à mettre la main dessus.
La Résurrection met devant nos yeux qui sont empêchés de voir un être réel, corporel mais qui inaugure une nouvelle dimension de la corporéité : le même et méconnaissable.
Le Ressuscité prend, une fois encore, le temps de nous rejoindre sur le chemin et prend, d’abord, le temps de nous écouter, de se mettre à l’écoute attentive de nos récits de colère, de nos questions, de nos mauvaises interprétations.
Pour être des témoins de la Résurrection il nous faut consentir à être également des témoins de sa crucifixion, de sa mort.
La reconnaissance de la Résurrection se fait dans la voix de Dieu devenue Parole qui se partage en Écritures qui brûlent le cœur et en pain qui nous transforme.
La Résurrection n’escamote pas notre liberté ; elle la porte à son plein épanouissement.
La Résurrection nous constitue témoins.
La Résurrection nous ouvre au don de l’Esprit qui nous promet que ce qu’il en est pour Jésus est ouvert à tous.
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2. Mt 18, 20
3. L’essentiel est invisible pour les yeux. On ne voit bien qu’avec le cœur. Antoine de Saint-Exupéry, Le Petit Prince.