Qu’est-ce que la « première annonce » ?

« Il appartient à tout chrétien de faire la vérité et de la dire, d’annoncer authentiquement l’Évangile, signe d’Espérance, quand les occasions se présentent. »

En chaque « situation de vie » peut se découvrir quelque chose de l’Évangile et de l’événement de salut qui s’y joue entre Dieu et l’homme. Dans le cadre d’un accompagnement en catéchèse, où la responsabilité catéchétique de l’Église s’exerce, ces situations de vie sont de réelles occasions de « première annonce », non d’abord comme un discours dissocié du présent, mais bien plutôt dans une relation fraternelle qui s’expose au risque de l’autre, se tourne vers la parole de Dieu, et l’annonce comme la source qui le fait vivre.

Sollicitant aussi bien notre créativité que notre spontanéité, la première annonce embrasse, ce qui, dans le témoignage de tout chrétien, favorise ou rend possible les premiers pas dans la foi chez celles et ceux qui (s’)en sont éloignés. Il est clair aujourd’hui que la réussite de l’homme, ses capacités personnelles et sa liberté lui font croire qu’il n’a pas ou plus besoin de Dieu. A ces transformations s’ajoute la perte d’espérance qui touche chacun dans sa réalisation personnelle.

C’est pourquoi, il appartient à tout chrétien de faire la vérité et de la dire, d’annoncer authentiquement l’Évangile, signe d’Espérance, quand les occasions se présentent. Chaque chrétien est donc convié à retrouver la dimension missionnaire des premières communautés chrétiennes au moyen d’attitudes authentiques et en puisant dans ses compétences personnelles.

La catéchèse, source de vitalité pour l »Église en France

Dans cet extrait du dossier de presse de septembre 2016 à l’occasion du jubilé des catéchistes, le père Pietro Biaggi, directeur adjoint du SNCC nous donne un éclairage :

Ce n’est pas un hasard si le pape François met la réflexion sur le kérygme et la première annonce au centre de sa nouvelle exhortation apostolique « La joie de l’évangile » : c’est le cœur battant de toute l’Eglise, le moteur qui doit donner vie à toute activité missionnaire, caritative et communautaire.

Le point de départ de cette réflexion est très important : « La doit donner lieu aussi à un chemin de formation et de maturation. L’évangélisation cherche aussi la croissance, ce qui implique de prendre très au sérieux chaque personne et le projet que le Seigneur a sur elle. » (EG 160)

Le Pape veut ainsi souligner que l’évangélisation et la catéchèse ne sont pas un simple chemin d’accompagnement qui laisse la personne dans la situation, où elle se trouve. Dans le respect de la singularité et de la richesse de chaque parcours de foi, le catéchète doit tendre vers une « maturation », c’est-à-dire viser une croissance, une « conversion de vie », dans laquelle se réalise la parole de l’apôtre Paul : « Ce n’est plus moi qui vis, mais le Christ qui vit en moi » (Ga 2, 20). Il ne s’agit pas de transmettre une série de doctrines mais d’aider à percevoir l’action de Dieu, ce don qui précède tous nos efforts et qui, grâce à l’Esprit Saint, permet de découvrir dans le visage de Jésus le Fils de Dieu né, mort et ressuscité pour notre salut. C’est la logique d’une pédagogie d’initiation authentique, dont le vrai acteur est le Seigneur.

Nous appelons « pédagogie d’initiation » toute démarche qui travaille à rendre effective chez une personne l’accueil de Dieu qui attire à lui. (TNOC 1.3)

La présence des catéchumènes et des recommençants dans nos Eglises nous rappelle que, dans la société actuelle, il est possible de faire le choix de croire. Ce choix implique une conversion. Il est le signe d’une liberté intérieure qui souvent prend ses distances avec certains aspects de la culture contemporaine. Il est une décision personnelle, celle d’accueillir le don de Dieu. La pédagogie d’initiation demande aux communautés chrétiennes de réunir les conditions favorables qui permettront aux personnes de faire ce choix. (TNOC 1.3)

La première annonce et le kérygme se trouvent au cœur de l’activité évangélisatrice et comprend le mot « première » au sens qualitatif : quand nous disons que cette annonce est « la première », cela ne veut pas dire qu’elle se trouve au début et qu’après elle est oubliée ou remplacée par d’autres contenus qui la dépassent. Elle est première au sens qualitatif, parce qu’elle est l’annonce principale, celle que l’on doit toujours écouter de nouveau de différentes façons et que l’on doit toujours annoncer de nouveau durant la catéchèse sous une forme ou une autre, à toutes ses étapes et ses moments. Pour cela aussi « le prêtre, comme l’Église, doit prendre de plus en plus conscience du besoin permanent qu’il a d’être évangélisé ». (EG 164)

Cette annonce est appelée « première » parce qu’elle appelle à croire et conduit au seuil où va être possible une conversion. Elle travaille à éveiller le désir, elle invite à un chemin de foi, elle suscite de l’intérêt, mais sans attendre que la personne à qui elle s’adresse ait déjà choisi de devenir disciple. (TNOC 1.4)

La première annonce est alors une dynamique permanente, qui est le fondement non seulement de toute activité évangélisatrice mais aussi l’annonce de la grâce et de la conversion primordiale de tout disciple, dans chaque moment de sa vie : « Toute la formation chrétienne est avant tout l’approfondissement du kérygme qui se fait chair toujours plus et toujours mieux, qui n’omet jamais d’éclairer l’engagement catéchétique, et qui permet de comprendre convenablement la signification de n’importe quel thème que l’on développe dans la catéchèse. C’est l’annonce qui correspond à la soif d’infini présente dans chaque cœur humain. » (EG 165)

Le Pape explique successivement quatre caractéristiques essentielles de la première annonce : « qu’elle exprime l’amour salvifique de Dieu préalable à l’obligation morale et religieuse, qu’elle n’impose pas la vérité et qu’elle fasse appel à la liberté, qu’elle possède certaines notes de joie, d’encouragement, de vitalité, et une harmonieuse synthèse qui ne réduise pas la prédication à quelques doctrines parfois plus philosophiques qu’évangéliques. » (EG 165)

Pour que le kérygme permanent de l’Eglise soit vraiment un « fondement », il doit afficher l’indicatif de la Grâce, avant l’impératif moral et être respectueux de la liberté du sujet, du temps, de ses fragilités ; la première annonce doit être perméable à la joie, qui est la caractéristique contagieuse des premières communautés chrétiennes : le kérygme doit posséder une organicité vivante et vitale pour ne pas réduire le témoignage à une transmission simpliste d’un concept.

C’est pourquoi ces « dispositions » simples, suggérées par le Pape François, peuvent devenir précieux pour tout évangélisateur : « Cela exige de l’évangélisateur des dispositions qui aident à mieux accueillir l’annonce : proximité, ouverture au dialogue, patience, accueil cordial qui ne condamne pas. » (EG 165)

Pietro Biaggi

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