La place d’Israël dans le Catéchisme de l’Église Catholique
Conférence de Mgr Pierre d’Ornellas au Collège des Bernardins le 19 juin 2018.
Le texte complet de la conférence à imprimer
Le Catéchisme de l’Église Catholique (CEC) a été approuvé le 25 juin 1992 et promulgué par la Constitution Apostolique de Jean-Paul II, le 11 octobre 1992, trentième anniversaire de l’ouverture du concile Vatican II.
Selon Jean-Paul II, son objet est « un exposé de la foi de l’Église et de la doctrine de l’Église, attestées ou éclairées par l’Écriture Sainte, la Tradition apostolique et le Magistère ecclésiastique. »
On n’y trouve donc pas apparemment un enseignement magistral concernant la relation de l’Église avec le Peuple juif. Les enseignements du Magistère qui sont antérieurs au 25 juin 1992 sont peu cités. À ce sujet, plusieurs remarques sont nécessaires.
La Constitution Dei Verbum n. 14-15 et la Déclaration Nostra Aetate n. 4 sont chacune mentionnées deux fois ainsi que la sixième oraison qui suit l’intention concernant le Peuple juif dans la Prière universelle dite pendant l’Office de la Passion le Vendredi saint.
Le CEC contient une référence au discours de Jean-Paul II à la synagogue de Rome, le 13 avril 1986. On peut regretter que d’autres discours de ce Pape, qui a tant fait pour approfondir la rencontre entre l’Église et le Peuple juif, n’aient pas été cités, comme, par exemple, celui du 17 novembre 1980 à Mayence ou celui du 6 mars 1982 à Rome aux délégués des Conférences épiscopales chargés de réfléchir sur les relations entre Juifs et Chrétiens.
Le CEC ne fait référence qu’à deux discours de Jean-Paul II, alors qu’il en cite cinq de Paul VI et six de Pie XII.
Hormis les textes de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, ceux des Congrégations romaines ou des Conseils pontificaux ne sont pratiquement pas cités.
Nous ne trouvons donc pas les deux documents de la Commission pour les relations religieuses avec le Judaïsme, qui appartient au Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens :
- Celui de 1974 intitulé « Orientations et suggestions pour l’application de la Déclaration conciliaire Nostra Aetate n. 4 » ;
- Celui de 1985 intitulé « Notes pour une correcte présentation des Juifs et du judaïsme dans la prédication et la catéchèse de l’Église catholique »
En 1974, dans les Orientations, il était suggéré : « De façon positive, il importe donc, en particulier, que les chrétiens cherchent à mieux connaître les composantes fondamentales de la tradition religieuse du judaïsme et qu’ils apprennent par quels traits essentiels les juifs se définissent eux-mêmes dans leur réalité religieuse vécue. » Il semble bien que cela ne soit pas l’objet du CEC. Il serait donc vain d’y chercher des éléments sur le Peuple juif ou sur le judaïsme. Cependant, des paragraphes du CEC disent quelque chose sur « Israël » ou le « Peuple juif ». Les rédacteurs du CEC ont-ils recueilli l’avis de Juifs sur ces paragraphes ?
En 1985, les Notes commencent par citer le discours important de Jean-Paul II, tenu le 6 mars 1982 : « …Vous vous êtes préoccupés, pendant votre session, de l’enseignement catholique et de la catéchèse par rapport aux juifs et au judaïsme… Il faudrait arriver à ce que cet enseignement, aux différents niveaux de formation religieuse, dans la catéchèse donnée aux enfants et aux adolescents, présente les juifs et le judaïsme, non seulement de manière honnête et objective, sans aucun préjugé et sans offenser personne, mais plus encore avec une vive conscience de l’héritage commun. »
Les Notes rapportent que cet héritage commun est « considérable », comme le souligne Jean-Paul II. Les Notes continuent de le citer : « En faire l’inventaire en lui-même, mais aussi en tenant compte de la foi et de la vie religieuse du peuple juif, telles qu’elles sont professées et vécues encore maintenant, peut aider à mieux comprendre certains aspects de la vie de l’Église. »
Les Notes poursuivent en rapportant les propos du saint Pape : « « En ce domaine, l’imprécision et la médiocrité nuiraient énormément » au dialogue judéo-chrétien (Jean Paul II, discours du 6 mars 1982).
Mais elles nuiraient surtout, étant donné qu’il s’agit d’enseignement et éducation, à la « propre identité » chrétienne (ibid.). » Il me semble que c’est plutôt dans ce sens-là qu’il faut lire le CEC. Dans quelle mesure est-il fidèle à cette recommandation de Jean-Paul II ?