« Je crois à la communion des saints »
Cet article est extrait du numéro 26 d’Ecclésia, Prolongements, page 30-31.
C’est un article du Credo que nous proclamons chaque dimanche. Mais de quelle communion s’agit-il ? De quels saints parle-t-on ? Ce n’est pas si clair … Cette expression recouvre plusieurs sens.
Qui sont les saints ?
Pour mieux comprendre, il n’est pas inutile de faire un peu d’histoire. C’est seulement au Ve siècle que cet article de foi a été inséré dans le Symbole des Apôtres. En réalité, il exprime une expérience vécue dès la naissance de l’Eglise par les fidèles du Christ : ceux-ci forment une « koinonia », c’est-à-dire une communauté (ou communion) unie et sanctifiée par le partage des mêmes « choses saintes ». Les « saints », ce sont les membres du peuple de Dieu qui, unis par le don de l’Esprit-Saint, partagent la Parole, célèbrent les sacrements et font fructifier ces dons dans leur vie. Ainsi comprise la communion des saints est une réalité que nous vivons dès maintenant sur cette terre. En nous communiquant sa propre vie, le Dieu saint qui est amour nous sanctifie et nous unit. La vie chrétienne n’est rien d’autre que le déploiement de ce don dans toutes les dimensions de notre existence.
Tous les défunts
Cela dit, il est vrai qu’en parlant de communion des saints on pense spontanément aux défunts. « Consciente de la communion qui unit tous les membres du Corps mystique de Jésus-Christ, l’Eglise en marche vers Dieu a honoré avec une grande piété la mémoire des défunts, et cela dès les premiers siècles de l’ère chrétienne », comme le rappelle le concile Vatican II (LG 50). Cette union avec ceux et celles qui sont déjà passés par la mort se réalise de la manière la plus éclatante dans la célébration eucharistique. Dans la communion de toute l’Eglise nous y faisons mémoire de tous ceux et celles qui nous ont précédés, qu’ils aient ou non appartenu à l’Eglise visible, car, comme le dit encore le concile Vatican II, « puisque le Christ est mort pour tous et que la vocation dernière de l’homme est réellement unique, à savoir divine, nous devons tenir que l’Esprit saint offre à tous, d’une façon que Dieu connaît, la possibilité d’être associé au mystère pascal. » (GS 22,5) Dans la mesure où Dieu leur communique sa vie, les défunts, chrétiens ou non, ont part à la communion des saints. Parmi eux, il y a les « Saints » que l’Eglise honore et prie plus spécialement parce que, « tout en partageant notre condition humaine, ils reflètent davantage les traits du Christ » (LG 50).
L’unité du genre humain
Tout cela nous apporte de précieux éclairages pour notre vie chrétienne. C’est une confirmation de l’appel universel à la sainteté sur lequel le concile Vatican II a tant insisté. Et c’est une invitation à comprendre le mystère de l’Eglise dans toute son ampleur. L’Eglise, ce n’est pas seulement le peuple des baptisés cheminant sur cette terre. Elle a pour mission d’« opérer l’union intime avec Dieu et l’unité du genre humain » (LG 1). Parmi ses membres il y a tous les êtres humains qui, au cours des millénaires, ont accueilli le don de Dieu sans que nous sachions comment. Nous sommes en communion avec eux. Très concrètement cela nous invite à rejoindre par la pensée et la prière tous ceux que nous avons aimés sur cette terre et que nous continuons à aimer. La foi chrétienne est réaliste : elle sait que les morts se taisent et qu’ils échappent à nos prises. Elle n’encourage pas la recherche des gens qui sont en quête de communication avec les défunts. Mais elle affirme que les relations ne sont pas rompues. Elles peuvent se poursuivre et même s’approfondir. Parmi les défunts, certains ont suivi le Christ avec une fidélité dont l’Eglise aime faire mémoire : en reconnaissant leur sainteté elle nous invite à nous appuyer sur leur témoignage et à compter sur leur soutien.
Nombreuses et diverses sont les expériences qui montrent comment la lumière de la foi éclaire les relations entre ceux qui vivent ici-bas et ceux qui sont passés par la mort. En Afrique, dans des cultures marquées par la crainte des morts, j’ai pu constater combien il est libérateur de vivre la relation aux défunts dans la communion de l’Eglise. En Extrême-Orient j’ai vu des chrétiens découvrir avec joie que le culte des ancêtres peut prendre la forme d’une communion dans le Christ avec des ascendants non chrétiens.
Croire à la communion des saints, c’est croire que l’œuvre du Saint-Esprit, qui achève toute sanctification, s’étend à l’humanité tout entière.
Soeur Christiane Hourticq, auxiliatrice
Que l’amour puisse parvenir jusqu’à l’au-delà, que soit possible un mutuel donner-et-recevoir, dans lequel les uns et les autres demeurent unis par des liens d’affection au-delà des limites de la mort – cela a été une conviction fondamentale de la chrétienté à travers tous les siècles et reste aussi aujourd’hui une expérience réconfortante.
Qui n’éprouverait le besoin de faire parvenir à ses proches déjà partis pour l’au-delà un signe de bonté, de gratitude ou encore de demande de pardon ? …
Aucun homme n’est une monade fermée sur elle-même. Nos existences sont en profonde communion entre elles, elles sont reliées l’une à l’autre au moyen de multiples interactions. Nul ne vit seul. Nul ne pèche seul. Nul n’est sauvé seul.
Continuellement la vie des autres entre dans ma vie : en ce que je pense, dis, fais, réalise. Et vice versa, ma vie entre dans celle des autres : dans le mal comme dans le bien. Ainsi mon intercession pour quelqu’un n’est pas du tout quelque chose qui lui est étranger, extérieur, pas même après la mort.
Benoît XVI, Spe salvi 48
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