Le Rituel de l’Initiation Chrétienne des Adultes (RICA) : structure, temps et étapes
Du 26 janvier au 3 février 2013, a eu lieu à Saint-Pétersbourg en Russie, un colloque national sur le catéchuménat (catholique latin). Des ateliers sur le document « Aller au cœur de la foi« , des conférences sur l’histoire du catéchuménat et sur le rituel d’initiation chrétienne étaient organisés autour du thème « Catéchuménat : chemin vers le cœur de la foi ». Le père Luc Mellet, directeur du SNCC, est intervenu pour une conférence sur la « Structure du catéchuménat selon le RICA » (Rituel d’Initiation chrétienne des adultes).
Le Rituel de l’Initiation chrétienne des Adultes
« Le catéchuménat est une chance pour l’Eglise. Il est une chance pour les personnes qui bénéficient de cette éducation à la vie « en Christ ». Car le catéchuménat est un processus de « passage au Christ », de conversion de toute une vie. Il s’agit plus de devenir chrétien que d’être baptisé. Il s’agit plus d’initier à la vie chrétienne que de préparer un sacrement ou une belle fête. »
« En portant notre attention sur la structure et les recommandations pastorales du Rituel, nous en percevons rapidement trois dimensions. Le catéchuménat est un « processus » qui s’inscrit dans le temps. Il est étroitement lié à la vie de la communauté chrétienne et son cœur réside dans le mystère pascal du Christ. Il fait vivre une expérience pascale qui structure la foi et la vie des disciples du Seigneur. »
Les étapes du RICA
« Après avoir porté notre attention sur la structure anthropologique et ecclésiologique du Catéchuménat, je voudrais maintenant considérer les étapes proprement dites du RICA. Leur élaboration dans l’histoire et leur restauration avec le concile Vatican II m’invitent à présenter tout d’abord un rapide survol historique. Il montrera combien aucune époque ne détient l’unique méthode d’accompagnement et de conduite de l’itinéraire. Puis je m’attacherai à lire les trois étapes qui structurent le catéchuménat et le RICA du point de vue des enjeux théologiques. Enfin, je proposerai une lecture des divers rites constitutifs de ces étapes. Tout ce processus compose et organise un itinéraire structuré sur les rites liturgiques. Il plonge le catéchumène, le célébrant et l’assemblée au cœur de la foi célébrée par l’Église. Toute l’Église est ainsi invitée par cet itinéraire liturgique à un renouvellement de sa propre foi grâce au cheminement des catéchumènes. »
Cette 2ème conférence dans son intégralité.
L’expérience française du catéchuménat et son évolution
En 2013 également, à Madrid cette fois, le Père Luc Mellet intervient plus globalement sur le catéchuménat en nous livrant son regard sur l’expérience française.
Introduction
Le catéchuménat en France est une réalité missionnaire inscrite dans le paysage pastoral depuis plus de 50 ans. Je pense qu’il est une vraie chance pour l’Eglise non seulement parce qu’il lui permet d’accueillir en son sein de nouveaux venus à la foi, c’est à dire qu’il permet de faire l’expérience qu’aujourd’hui, dans un contexte pluraliste d’indifférence ou de rejet de la foi, de rupture de tradition et de doute sur le sens de l’existence, il est possible de faire le choix de croire1. L’Eglise découvre jour après jour dans la vie concrète des paroisses, des Mouvements, communautés nouvelles, établissements scolaires catholiques, que la foi est un don de grâce et ne répond pas seulement à un processus bien rodé de transmission. La nouveauté de l’Evangile séduit aujourd’hui des cœurs et des vies de nombreux adultes. Ainsi les catéchumènes permettent aux communautés chrétiennes locales, de faire l’expérience de l’enfantement à la vie selon l’évangile. C’est une expérience nourrissante pour les chrétiens de longue date d’être rendus témoins de l’engendrement à la vie de Dieu en l’homme, de découvrir qu’ils vivent dans le mystère de l’Ecclesia Mater2.
Mais le catéchuménat est une chance pour l’Eglise également parce qu’il l’appelle à se renouveler de l’intérieur. En effet, l’accompagnement de plus en plus fréquent de nouveaux venus à la foi demande aux communautés chrétiennes de revisiter leur capacité à vivre une vie fraternelle, une communion (koinonia3) au nom du Christ. Il faut une certaine qualité de vie fraternelle en Christ (adelphotes en Christo, fraternitas4 in Christum) pour rendre possible l’intégration de frères plus jeunes dans la foi. Car l’intégration à l’Eglise de ceux qui deviennent chrétiens à l’âge adulte nécessite comme en dialogue une plus grande intégration de l’Eglise dans le mystère de la fraternité universelle reçue par tous, dans la Pâque du Christ.
Finalement, le catéchuménat est une chance pour l’Eglise car il la décentre d’elle-même au moment ou elle accueille dans la piscine baptismale de nouveaux frères “du“ Christ qu’elle doit recevoir comme frère “en“ Christ. L’unité des trois sacrements de l’initiation chrétienne signifie bien que ceux qui sont donnés comme fils à l’Eglise par la fontaine baptismale entrent en même temps et de plein-pieds dans la communion sacramentelle au Corps du Christ c’est à dire également dans le mystère de l’Eglise sacrement du salut5 pour les Nations6. Nous avons tous vive conscience que la vie chrétienne ne peut pas se contenter d’une approche individualiste de la foi. Nul n’est chrétien “pour soi-même“ mais en tant que membre du Corps du Christ, “pro Ecclesia“ et “pro mundo“ indissociablement liés.
Après cette ouverture de type théologique, je regarderai dans un premier temps quelques éléments de l’histoire du catéchuménat en France au cours du XX° siècle en montrant les évolutions principales et les transformations que cette pastorale a vécues. Dans un deuxième temps, je présenterai les questions actuelles que porte le catéchuménat comme institution pastorale qui vise le “passage au Christ“ ou plutôt comme réalité qui veut vivre et servir ce “transitus in Christo“. Si le “passage au Christ“ est avant tout d’ordre spirituel, répondant à un appel intérieur, un attrait, une “séduction“, il est également d’ordre existentiel; toute la vie du disciple est transformée par la rencontre avec le Christ. Mais ce “passage“ est toujours aussi d’ordre ecclésial7. Le sympathisant, le catéchumène, le néophyte découvre et apprend à vivre en relation avec cette nouvelle famille qui lui est donnée. Ce n’est pas le moindre des enjeux du catéchuménat. La communauté chrétienne – l’Eglise – est d’ailleurs impliquée par nature dans l’agrégation d’un nouveau venu à la foi comme membre du Corps ecclésial. Le baptême «incorpore les hommes à l’Eglise… Il est un lien sacramentel d’unité…»8. C’est pourquoi le catéchuménat, réalité vivante de l’Eglise toujours en mouvement, questionne le vivre ecclésial et fait bouger l’Eglise[9] «pour laisser place à l’inattendu de Dieu»10.
1. Eléments de l’histoire du catéchuménat en France
Après de longs siècles de désuétude, le catéchuménat des adultes est l’objet d’un regain d’intérêt au cours du XX° s. dans les pays de mission comme dans l’Europe chrétienne et en France tout particulièrement. Le renouveau apporté par le concile Vatican II va permettre une redécouverte de son organisation par étapes liturgiques. En 1972, le Rituel Romain (RR) est adopté. En France, dès 1974 nous disposons de fiches « ad experimentum »11. Mais le Rituel de l’Initiation Chrétienne des Adultes, (RICA) en langue française, dans sa forme définitive, n’est promulgué qu’en 1997. « Le RICA invite très clairement à se détacher vraiment du modèle longtemps unique de l’initiation chrétienne des petits enfants où l’on comprend que les trois sacrements aient été étalés dans le temps. »12 L’enjeu majeur de l’unité des trois sacrements est la manifestation de « l’unité du Mystère pascal, le rapport étroit entre la mission du Fils et le don de l’Esprit Saint, et la conjonction de ces sacrements par lesquels le Fils et l’Esprit sont communiqués avec le Père aux baptisés » (RICA 211 – RR 34).
Mais d’où venons-nous en France ?
Aujourd’hui où en sommes-nous ?
2. Les questions du catéchuménat aujourd’hui
Une deuxième partie de mon propos va présenter maintenant la situation actuelle du catéchuménat en France. Non pas tant du point de vue quantitatif qu’au regard des questions qui évoluent ou qui se posent dans un contexte nouveau ou avec une nouvelle acuité.
Question de la conversion et processus catéchuménal et du parrainage
Le modèle de type catéchuménal
Le RICA
« Rencontre avec Jésus le Christ »
Le pré-catéchuménat
Conclusion
On le voit, en ces temps nouveaux pour l’évangile qui se profilent avec l’appel urgent à la promotion de la Nouvelle évangélisation le catéchuménat se présente, riche de ses questions, de ses difficultés, de ses dynamismes, de ses initiatives… L’expérience française est déjà assez ancienne pour que nous puissions dire qu’elle sera durable et qu’elle ne sera pas le fruit d’un effet momentané de mode spirituelle ou pastorale. Nous voyons également que lorsqu’une paroisse ose signifier l’appel à se mettre en route vers la vie de baptisé aussitôt surgissent des demandes qui viennent de toute part. Si le catéchuménat a connu dans le passé des périodes de relative discrétion pastorale, il est clair qu’aujourd’hui, il participe pleinement de l’audace et de la nouveauté de l’évangile dont les paroisses doivent pouvoir faire part à travers leur vie habituelle comme au moment de temps forts liturgiques ou missionnaires. Certes, la pastorale catéchuménale n’est pas la seule sur le terrain de la Nouvelle évangélisation, mais elle est certainement la plus structurée sur la liturgie qui est la grande école de la foi pour le peuple de Dieu et sur la Parole de Dieu articulée aux questions existentielles de la vie des hommes. Cet acquis est solide. Il est fondé. Je crois sincèrement qu’il est prophétique si nous engageons des forces pastorales dans le travail de conversion permanente que le catéchuménat rappelle à l’Eglise de vivre ! « Passer au Christ » c’est gagner la vie… Le catéchuménat est une véritable chance pour l’Eglise.